Je viens de terminer une année sabbatique à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) à Benguérir. En effet, je suis professeur à Polytechnique Montréal et tous les 7 ans, nous avons le choix de passer une année n’importe où dans le monde, dans une université, une industrie… afin de s’inspirer, de réfléchir, de créer de nouveaux liens, d’apprendre de nouvelles théories, technologies et de les réintroduire dans notre université au bénéfice de nos propres étudiants et chercheurs… Il est temps d’en dresser un bref bilan.
D’abord, c’est très difficile de s’arracher de son nid, de son confort pour commencer une «nouvelle vie» sans sa petite famille alors qu’on menait une vie tranquille et douillette. Ça prend du courage, de l’humilité et un brin de folie, car il faut tout rebâtir: un nouveau milieu, de nouveaux amis, de nouvelles procédures, de nouveaux repères… Mais au bout du compte, c’est une aventure extraordinaire, sur tous les plans. J’ai appris tellement, partagé tellement… j’ai vécu à mille à l’heure. Je suis une sorte de «born again» avec un vécu. Un nouveau-né prêt à rebâtir l’impossible avec de nouvelles approches, de nouveaux outils, de nouveaux moyens, de nouveaux collaborateurs…
Les premiers jours sont difficiles: seul, nouveau, ne connaissant presque personne, isolé… Mais rapidement, une équipe d’une gentillesse et d’une bonté sans égales dirigée par un patron éclairé, dévoué et amical m’a aiguillé et permis de bien m’installer dans l’hôtel où j’ai logé tout le long de cette année. Tout le personnel était aux petits soins pour me faciliter la vie. Ensuite, tous les services de l’UM6P ont pris le relais avec professionnalisme et m’ont facilité grandement mon séjour «technique» pour que je puisse me consacrer à mes occupations professionnelles. L’hôtel dispose d’ailleurs de toutes les installations possibles: gym, piscine, hammam… Attention à la nourriture gastronomique marocaine et aux plats succulents du chef: gros risque de prendre du poids, beaucoup de poids! Vous êtes prévenus.
L’UM6P est un concept radicalement nouveau, créé par un visionnaire, un bâtisseur, un penseur, un éclaireur qui est soutenu par une merveilleuse équipe, à la tête de laquelle se trouve un président intelligent, attentionné, à l’écoute et agissant avec une profonde humilité. L’architecture de l’UM6P est pharaonique, mais avec modération. Elle a été construite en un temps record avec une économie de type «guerre». On bâtit le plus rapidement possible. Des erreurs, bien sûr qu’il y en a, mais on corrige, on optimise après. Il n’y a pas de temps à perdre. Une beauté à couper le souffle. Rien à envier à toutes les universités dans le monde. Son ouverture vers l’extérieur, d’abord vers le reste du Maroc, ensuite en Afrique et enfin au monde est sans borne. Elle doit être connue et reconnue de partout, à travers le monde. Ses capacités de recherche et d’enseignement sont encore en développement, mais les signes avant-coureurs sont radieux et un espoir sans limites est en train de naître. Tout y est, et ce qui manque on l’invente! Des moyens colossaux sont mis au service des professeurs de l’UM6P et de leurs chercheurs et par domino des autres chercheurs marocains pour inventer, créer, expérimenter, rédiger, publier, breveter… Juste deux exemples:
1. un pôle de santé en pleine effervescence imaginé par un couple prodigieux et son équipe: un jeune, mais attention: il est issu des plus grandes universités dans le monde, et un vieux avec un cœur d’or, un aimant, un passionné avec une imagination débordante et mettant toute son expérience à l’œuvre, un chef-d’œuvre! Ce pôle sera sans aucun doute un phare africain.
2. Une entité TechCell unique au monde, au service de tous les chercheurs marocains, africains et même mondiaux, capable de transformer leurs découvertes scientifiques et techniques en richesses, en impacts socio-économiques. Le Maroc et l’Afrique exportent encore beaucoup de matières premières, des richesses gigantesques sans transformation. Il est grand temps d’en faire des produits à hautes valeurs ajoutées. C’est maintenant une réalité grâce au couple TechCell et ceux qui y font appel.
De nombreux autres développements sont déjà en place et d’autres sont en train de se réaliser. Le rêve est déjà présent et de nouveaux «presque impossibles» continuent de devenir réalité, sans interruption, tous les jours. Ainsi, de nombreux professeurs et leurs chercheurs s’attaquent déjà d’une manière efficace et originale aussi bien à des problèmes universels qu’à des problèmes criants en Afrique: la rareté de l’eau, l’agriculture dans les milieux arides et semi-arides, les énergies nouvelles et leurs stockages, les nouveaux fertilisants pour nourrir la population mondiale qui a augmenté de manière faramineuse, les nouveaux matériaux, les émissions et les réductions à la source des gaz à effet de serre, les problèmes environnementaux, le recyclage de déchets dans une économie de type circulaire, les ordinateurs quantiques, l’intelligence artificielle… Le fait d’y avoir participé pendant une année entière comme un grain de sable appartenant à un tout est prodigieux! Je me suis senti privilégié d’y avoir œuvré. Comme l’aventure doit se perpétuer, j’ai décidé, d’un commun accord, de continuer à y prendre part sous une autre forme, comme professeur affilié. Comment peut-on penser à quitter un bateau aussi unique, rarissime et qui offre autant de possibilités avec au bout du compte de vrais impacts: relever le niveau de vie de tous les Marocains, de tous les Africains?
À l’instar de l’exploit de notre équipe du Maroc qui a brillé dans le firmament mondial, l’UM6P, la locomotive des universités marocaines et africaines, va paver la voie pour devenir une des plus grandes universités dans le monde. Elle ne va pas leur ressembler, car son développement est unique et ses objectifs sont particuliers: faire évoluer et enrichir l’Afrique. Toute la diaspora marocaine, arabe et africaine est invitée à y accéder, à contribuer, à aider et à bâtir le futur de demain. L’UM6P est en train de créer une position, un titre à définir à toute la diaspora marocaine et africaine pour qu’elle puisse participer à cette fête, à cette communion même à distance. Ensemble, osons l’impossible (car ici il se réalise): dans quelques années un prix Nobel sera um6pien ou um6pienne. D’ici là, il faut travailler, travailler et surtout travailler bin nia…