Ce philosophe de formation, célébré sur le tard alors qu'il approchait la cinquantaine, a réussi un coup de maître avec son premier roman publié en 1980: "Le Nom de la rose" s'est vendu à plusieurs millions d'exemplaires et a été traduit en 43 langues.
Consécration: il a été adapté au cinéma en 1986 par le Français Jean-Jacques Annaud avec Sean Connery dans le rôle du frère Guillaume de Baskerville, l'ex-inquisiteur chargé d'enquêter sur la mort suspecte d'un moine dans une abbaye du nord de l'Italie.
Truffé de latin, le polar de ce sémiologue de renom à la rondeur affable a même été la cible d'éditions pirates, notamment en arabe sous le titre "Sexe au couvent".
Eco, un petit-fils d'éditeur issu de la petite bourgeoisie, a raconté avoir commencé à écrire dès l'âge de dix ans des histoires dont il réalisait lui-même l'édition. Né à Alessandria (nord de l'Italie) le 5 janvier 1932, il a étudié la philosophie à l'Université de Turin et consacré sa thèse au "problème esthétique chez Thomas d'Aquin".
Ce spécialiste de l'histoire médiévale, qui a traduit Nerval en italien et qui connaissait par coeur Cyrano de Bergerac, a aussi travaillé pour la radio-télévision publique italienne Rai, l'occasion pour lui d'étudier le traitement de la culture par les médias.
Polyglotte, marié à une Allemande, Eco a enseigné dans plusieurs universités, en particulier à Bologne (nord) où il a occupé la chaire de sémiotique jusqu'en octobre 2007, date à laquelle il a pris sa retraite. Umberto Eco a expliqué s'être mis sur le tard à la fiction car "il considérait l'écriture romanesque comme un jeu d'enfant qu'il ne prenait pas au sérieux".
Homme de gauche
Après "le Nom de la rose", il a notamment offert à ses lecteurs "Le Pendule de Foucault" (1988), "L'île du jour d'avant" (1994) et "La mystérieuse flamme de la reine Loana (2004)". Son dernier roman, "Numéro zéro", publié en 2014 est un polar contemporain centré sur le monde de la presse.
Il est aussi l'auteur de dizaines d'essais sur des sujets aussi éclectiques que l'esthétique médiévale, la poétique de Joyce, la mémoire végétale, James Bond, l'art du faux, l'histoire de la beauté ou celle de la laideur.
"Le beau se situe à l'intérieur de certaines limites tandis que le laid est infini, donc plus complexe, plus varié, plus amusant", expliquait-il dans une interview en 2007, ajoutant qu'il avait "toujours eu de l'affection pour les monstres". Affirmant "écrire pour s'amuser", Il Professore - des yeux malicieux derrière des lunettes et une barbe blanche - était aussi bibliophile et possédait plus de 30.000 titres dont des éditions rares.
"Eco était un premier de la classe, très intelligent, très érudit. Il a incarné avec brio la figure de l'intellectuel européen. Il était aussi à l'aise à Paris et Berlin qu'à New York ou Rio", estime Alain Elkann. Homme de gauche, Eco n'avait rien de l'écrivain enfermé dans sa tour d'ivoire et ce joueur de clarinette écrivait régulièrement pour l'hebdomadaire L'Espresso.
Après la victoire aux élections législatives de Silvio Berlusconi en 2008, il avait consacré un article au retour de l'esprit des années 40, regrettant d'"entendre des discours semblables à ceux sur “la défense de la race” qui n'attaquaient pas seulement les Juifs, mais aussi les Tziganes, les Marocains et les étrangers en général".