Cela fait cinq mois que les enseignants des conservatoires communaux de Casablanca n'ont pas perçu leur salaire. Cette situation a fait souffler un vent de colère dans les rangs des professeurs de ces établissements, placés sous la tutelle du Conseil de la ville de Casablanca.
Une grève avait été annoncée pour le jeudi 13 juin dernier, mais elle n'aura finalement pas eu lieu.
Certains avaient même appelé au boycott des examens et brandi la menace d'une année blanche.
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Sur place, la réalité est autre. En pleine période d'examens, élèves et enseignants sont présents.
"Nous sommes en examen jusqu'au 23 juin. Vous voyez bien, vous êtes bien venus à l'improviste, et tout se déroule tout à fait normalement, il n'y a pas de grève, pas d'année blanche, tout cela c'est du pipeau", déclare Abdelouahed Benohoud, directeur du Conservatoire communal du boulevard de Paris. Nommé en février dernier, ce dernier chapeaute les 12 autres conservatoires communaux de la métropole.
Ces conservatoires, où sont délivrés des cours artistiques, moyennant une inscription annuelle pour la modique somme de 200 dirhams, dispensent des cours de musique, de danse classique, de théâtre et d'arts plastiques.
Si le tarif d'inscription est très raisonnable et à la portée de la plupart des bourses, la rémunénation des enseignants, quant à elle, qui a toujours été sous forme de vacations, est aujourd'hui source de malaise.
"Les enseignants protestent à cause d'un retard dans le paiement des salaires. Ce problème sera réglé incessamment, dans les jours qui viennent", tient à préciser Abdelouahed Benohoud.
De son côté, un professeur de guitare explique, devant Le360, que la colère des professeurs est due à une appréhension des quelques 273 professeurs d'enseignement artistique, vacataires dans les treize conservatoires de musique que compte Casablanca.
"Lorsqu'ils ont entendu que la ville avait mandaté la société Casa Event et animation [Société de Developpement Local, chargée, entre autres, de la gestion des stades de la ville et de l'organisation du festival de Casablanca, Ndlr] de s'occuper du paiement de leur salaire, ce fut la panique", affirme-t-il.
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Le directeur du Conservatoire communal du boulevard de Paris confirme ces dires et se fait rassurant: "effectivement, ce retard est dû à ce changement. Ce n'est plus la ville de Casablanca qui va payer directement les enseignants mais la société. Le positif dans tout cela, c'est qu'à partir de ce premier virement de CasaEvent, les enseignants recevront leurs salaires tous les mois, et à la même date".
Autre précision: la première catégorie de professeurs, ceux qui disposent du diplôme du premier cycle des conservatoires de musique au Maroc, seront désormais payés au tarif de 65 dirhams de l'heure, pour un plafond qui peut atteindre un taux horaire maximal de 100 heures.
Interrogé par Le360, Mohamed Jouahri, directeur de Casa Event, confirme cette nouvelle modalité de règlement des vacations dus aux professeurs, tout en refusant d'en dire plus. "Nous sommes mandatés par le Conseil de la ville de Casablanca pour virer les salaires aux enseignants, mais il s'agit toujours du budget de la ville", indique-t-il sans vouloir donner plus de précisions.
Pour Nour El Houda Abouadihaj, enseignante de solfège et de Kanoun, il est hors de question que les élèves pâtissent de cette situation: "ce n'est pas parce que nous sommes payés en retard que nous ferons grève et pénaliserions nos élèves... Ils n'y sont pour rien. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois que nous recevons nos salaires en retard. Il fut un temps où nous recevions nos salaires à chaque été, ce qui signifie que nous étions payés avec un an de retard".
Le vrai problème des conservatoires de musique est donc, au final, le système de rétribution mis en place, celui des vacations, qui ne convient pas aux enseignants.
"La plupart des enseignants ici sont obligés d'avoir recours à un autre travail pour s'en sortir, sinon, c'est réellement la misère. Il faut revoir tout le systeme. Et les solutions existent: par exemple, signer des contrats avec les enseignants", déclare Salah Cherkaoui, enseignant de chant et ancien directeur du conservatoire communal d'Anfa.