L’entreprise allemande GFK a remporté l’appel d’offres des mesures d’audience télé au Maroc en juillet 2014. Depuis, c’est Marocmétrie qui a été chargée de produire les mesures d’audience quotidiennes, par le maître d’ouvrage, le centre interprofessionnel de l’audimétrie médiatique (CIAUMED).
GFK devait démarrer véritablement sa nouvelle activité début 2016 mais, six mois après, c’est toujours Marocmétrie qui est aux commandes.
Car une fois le nom de son successeur annoncé, Marocmétrie a cherché par tous les moyens à protéger son activité. Pour assurer ses prestations et obtenir plus de visibilité, l’entreprise a signé plusieurs avenants de son contrat avec le CIAUMED qui devait courir jusqu’au démarrage effectif de GFK. Et réclamer au passage une augmentation de ses tarifs.
Mais le maître d’ouvrage ne l’entendait pas de cette oreille et a rejeté ces nouveaux tarifs. Les relations commençaient à devenir difficiles et les règlements des factures du CIAUMED à Marocmétrie prenaient du retard. L’entreprise a dû menacer d’arrêter ses services pour obtenir enfin ses règlements.
Dans un communiqué datant du 5 février 2015, le maître d’ouvrage donne sa version des faits et explique qu’il y avait plusieurs facteurs qui auraient pu conduire Marocmétrie à revoir ses prix à la baisse. «Le cahier des charges de la mesure pour 2015 ne comporte ni étude d’intermétrie, ni étude de cadrage. Il ne prévoit pas non plus de renouvellement des foyers panélistes. Malheureusement, elle exige des montants bien supérieurs au juste prix et reste inflexible sur le plan commercial malgré les efforts des membres du CIAUMED notamment pour éponger les arriérés de règlement.»
Mais le CIAUMED n’a d’autre choix que de négocier de nouveau avec Marocmétrie puisqu’il est impensable de suspendre les mesures d’audience. Après ces tensions qui vont durer plusieurs mois, la situation sera enfin assainie et le CIAUMED se pliera aux exigences de Marocmétrie qui aura revu entretemps ses ambitions à la baisse.
Aujourd’hui, selon Younes Alami, le directeur de Marocmétrie, la page est tournée et la situation s’est assainie depuis plus d’un an. «Nous avons réglé tous les problèmes que nous avions avec le CIAUMED dans le cadre des avenants contractuels qui ont été signés et tout est rentré dans l’ordre», a-t- il déclaré à Le360.
Du côté du CIAUMED même son de cloche. Mostapha Alaoui, le directeur général, souligne lui aussi qu’il n’ y a aucun problème dans les relations avec Marocmétrie qui assure la continuité du service jusqu’au démarrage de GFK.
La clause qui fâche
Aucune information ne circule par ailleurs sur les raisons du retard et sur la date exacte de la mise en service des nouvelles mesures d’audience de GFK. Contacté par nos soins, le top management de l’entreprise installée à Sidi Maarouf à Casablanca, n’a pas souhaité répondre à nos questions et renvoie la balle au CIAUMED. «Nous ne sommes qu’un prestataire de service et nous ne sommes pas autorisés à répondre à ces questions».
Une réponse peu convaincante puisque quelques minutes auparavant, le directeur du CIAUMED nous affirmait que c’est à GFK d’annoncer la date de démarrage.
Mais une clause stipulerait que l’entreprise peut arrêter la mesure d’audience à n’importe quel moment, une décision à laquelle s’oppose le CIAUMED. Mostapha Alaoui ne confirme pas cette information mais ne la nie pas pour autant. «Oui, vous savez tous les pays européens mettent cela comme clause dans les contrats. Mais c’est inadmissible nous ne pouvons pas accepter cela». Ce genre de clause est selon lui une manière de contracter une assurance et faire payer le prix fort au maître d’ouvrage. Après d’âpres négociations, le contrat a finalement été signé après que cette clause soit retirée.
Concernant le retard du démarrage, Mostapha Alaoui rappelle que lors du premier appel d’offres remporté par Marocmétrie, plus de deux ans se sont écoulés entre la date de l’ouverture des plis et le démarrage effectif. «Le processus est long, il faut des études de cadrage, il y a beaucoup de travail avant de commencer».
Quid du fonctionnement
En octobre 2015, le CIAUMED a présenté le nouveau système de mesure d’audience version GFK aux chaînes de télévision, aux annonceurs, aux agences et aux régies publicitaires.
Ce système fait appel aux technologies watermarking et fingerprinting pour mesurer l’audience des programmes, des écrans publicitaires et des autopromotions, à la seconde près. Avec le watermarking, une marque est ainsi insérée à la source par la chaîne, durant la diffusion d'un programme et reste intégrée dans le programme quel que soit l'équipement avec lequel il est regardé. Le fingerprinting consiste à prélever un morceau de contenu audiovisuel visionné ou entendu sur une plateforme, quelle qu'elle soit.
L’audimétrie permet l’identification des chaînes et des programmes regardés qu’ils soient diffusés en analogique ou en numérique, que le mode de réception soit hertzien, satellitaire ou par ADSL. Une télécommande accompagne l’appareil qui permet à chaque membre du foyer de s’annoncer lorsqu’il rentre ou qu’il quitte la pièce où le téléviseur est allumé.
Un panel sera constitué à partir d’une étude de cadrage qui est lancée par le CIAUMED et une «étude d’établissement» sur la base d’un échantillon qui devrait couvrir tout le territoire.Cet échantillon sera établi selon la méthode probabiliste aléatoire sur la base des données récentes du Haut Commissariat au Plan.
GFK promet de produire annuellement des données sociodémographiques, d’équipements, d’habitudes d’achat et de loisirs de la population.
En attendant, ce sont uniquement les chaînes de la SNRT et 2M qui font parie du panel des 750 foyers représentant les 3.386 individus mesurés par Marocmétrie.