Même si elle ne contient pas de révélations, cette série documentaire, qui compte quatre épisodes d'une heure chacun et sera diffusée en mars sur OCS en France, devrait achever de torpiller la réputation du metteur en scène new-yorkais.
Les réalisateurs Kirby Dick et Amy Ziering, documentaristes reconnus, livrent ici un exposé qui reprend l'enquête, avec témoignages et documents à l'appui, dont certains inédits, mais va bien au-delà.
Dylan Farrow a accusé Woody Allen de l'avoir agressée sexuellement en août 1992 alors qu'elle était âgée de 7 ans, ce que le réalisateur a toujours réfuté.
Dans le documentaire, le lien est fait entre l'agression sexuelle présumée de Dylan, et la relation de Woody Allen avec la fille adoptive de sa compagne Mia Farrow, Soon-Yi Previn, devenue sa femme, mais plus généralement avec le goût du réalisateur oscarisé pour les jeunes filles.
Documents et témoignages indiquent notamment que le metteur en scène a eu des relations sexuelles avec Soon-Yi bien avant sa majorité.
A ces éléments, troublants, "Allen v. Farrow" superpose la propension supposée de Woody Allen à la manipulation, de la presse notamment, pour atténuer la portée des accusations et discréditer Mia Farrow.
Le film va jusqu'à laisser entendre qu'il pourrait avoir fait dérailler les deux enquêtes officielles sur l'affaire, dont aucune n'a abouti à des poursuites.
Plus globalement, le documentaire dénonce la culture de la domination masculine pré-MeToo, qui a permis à de nombreux hommes de pouvoir d'abuser impunément de leur position, parfois au vu et au su d'une partie de leur milieu professionnel.
En outre, "Allen v. Farrow" aura une résonnance particulière en France, à l'heure où l'affaire Duhamel a déclenché une série d'accusations d'inceste visant des personnalités publiques.
Les auteurs montrent aussi comment Allan Konigsberg, de son vrai nom, a continué à bénéficier du soutien indéfectible du monde du cinéma après sa mise en cause, tandis que Mia Farrow, privée de rôles, devenait, selon elle, persona non grata à Hollywood.
Ce n'est qu'en 2017, à la faveur d'une tribune de Dylan Farrow, et du soutien public renouvelé de son frère Ronan, journaliste devenu héros du mouvement #MeToo, qu'acteurs et actrices ont pris publiquement leurs distances avec l'octogénaire, très isolé depuis.
Pour Kirby Dick, le propos est élargi au point que ce documentaire, qui porte pourtant le nom de Woody Allen, "n'est pas vraiment sur lui", a-t-il avancé dans un entretien au Washington Post.
"Cela parle d'un système", a confirmé Amy Ziering. "Ce film touche à la complicité, le pouvoir de la célébrité, le pouvoir de la manipulation, la façon dont nous allons croire quelque chose qui sera suffisamment répété."
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"Allen v. Farrow" est aussi une plongée dans l'univers de Dylan Farrow, qui se livre ici comme elle ne l'avait encore jamais fait auparavant, encore visiblement marquée, près de 30 ans après, par un profond traumatisme.
"Il y a eu tellement de désinformation, (...) de mensonges", dit celle qui est désormais elle-même mère. "On a douté de moi, on m'a mis sous un microscope, j'ai été humiliée", tandis que son père adoptif "était en roue libre".
Reste l'absence pesante de Woody Allen lui-même durant ces quatre heures de réquisitoire impitoyable, même si sont intégrés des extraits du livre audio, lu par le réalisateur, de sa récente autobiographie, "Soit dit en passant" (2020).
Aucun témoignage ne vient apporter la contradiction, son épouse Soon-Yi et son fils adoptif Moses, soutien public de son père par le passé, ayant refusé de collaborer au projet.
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Sollicité par l'AFP, Woody Allen n'a pas donné suite.
"Je pense que beaucoup de gens qui verront" le documentaire, a dit Kirby Dick, "y compris des personnes qui défendent Woody Allen aujourd'hui, vont changer d'avis ou voir les choses d'une façon très différente."