Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, a tenu à le préciser clairement: «il n’accepte absolument pas l’intervention des juges dans le processus législatif. Ces derniers ne peuvent donner leur avis sur les textes juridiques que si cela leur est expressément demandé, conformément à l’article 113 de la Constitution», rapporte Assabah dans son édition du jeudi 13 mars.
Le ministre s’est engagé dans un échange verbal animé avec certains membres de la Commission de la justice à la Chambre des représentants, au cours de plus de six heures de débats sur le projet de Code de procédure pénale, dans la soirée du mardi, ajoute le quotidien. «Suis-je obligé de solliciter l’avis du pouvoir judiciaire alors qu’il lui est interdit d’interférer dans les pouvoirs législatif et exécutif?», s’est-il interrogé devant les élus.
Il a expliqué avoir ouvert le débat avec le président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et le président du ministère public, échangeant des points de vue avec eux dans un climat de respect. Toutefois, il a souligné qu’il leur était interdit d’intervenir dans la législation, car cela relève des compétences du Parlement. De la même manière, selon l’article 109 de la Constitution, les pouvoirs législatif et exécutif ne doivent pas interférer dans le domaine judiciaire. «Nous n’interférons pas dans les décisions judiciaires, et lorsqu’une personne tente de transformer une association en syndicat et d’imposer son intervention dans la législation, cela est inacceptable», précise Ouahbi.
«Le ministre fait sans doute allusion au Club des magistrats du Maroc», note Assabah. Il a ajouté que, dans certains pays, une personne occupant une telle fonction judiciaire serait tenue de démissionner si elle souhaitait intervenir dans le processus législatif.
Par ailleurs, concernant les plaintes déposées par des associations contre des élus, le ministre se montre intraitable. «Il n’acceptera aucune modification de l’article 3 du projet de Code de procédure pénale relatif à la dénonciation de la corruption», affirme le quotidien. Certains députés estiment que cette position «relève d’une pratique dictatoriale». Pour toute réponse, il les a invités à se mettre d’accord sur un amendement unifié, à le voter à la majorité et à le faire passer malgré son opposition.
Abdellatif Ouahbi a également réagi aux interventions d’Ahmed Touizi, chef du groupe du PAM, et de Mahdi Fatimi, du groupe de l’USFP, qui ont subi des poursuites judiciaires initiées par des associations, «certaines ayant pratiqué le chantage financier». À ce sujet, il a présenté les statistiques entre 2021 et 2024, révélant que le Parquet avait reçu 106 plaintes d’associations pour des affaires de «détournement et de dilapidation de fonds publics». Parmi celles-ci, 31 ont été classées sans suite, 61 sont encore en cours d’examen, 8 font l’objet d’une enquête et 6 ont été renvoyées devant le tribunal.
Concernant les plaintes contre les présidents de collectivités territoriales, le Parquet a enregistré 259 plaintes entre 2020 et 2024, dont 112 ont été classées faute de preuves, 132 sont toujours en cours d’investigation, et 5 ont été renvoyées en procès.
Par ailleurs, un autre point de discorde a suscité la polémique: la suppression de la référence à la religion islamique dans le préambule du projet de Code de procédure pénale. Les députés du PJD ont protesté et interrogé le ministre sur la signification de cette suppression dans la nouvelle version du texte. Ce dernier a répondu que la procédure pénale ne relevait pas de la religion, précisant que les procédures légales sont une création de la société. Il a poursuivi en expliquant, par exemple, que mentionner la référence islamique dans le préambule pourrait priver les Marocains de confession juive des droits garantis par ce texte légal.
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