Ce 22 avril, l’Association marocaine des droits humains (AMDH) tiendra son 11e conclave national. Mais depuis quelques semaines, les camarades d’Ahmed El Hayej, son président, crient au scandale et accusent les autorités d’essayer de faire capoter leur grand rendez-vous. De la poudre aux yeux pour masquer ce que Annahj Addimocrati, une surréaliste survivance politique dans le paysage national, prépare dans les coulisses pour continuer à mettre la main sur cette ONG, ses structures et surtout ses finances.
Un congrès pour la forme
Depuis 2010, l’AMDH est tombée dans l’escarcelle d’Annahj et ce hizbicule n’est pas prêt à lâcher prise. Jugez-en!
Selon les informations dont dispose Le360 : sur les 530 congressistes désignés, 57% sont issus des rangs d’Annahj contre seulement 28% pour la Fédération de la gauche démocratique (FGD regroupant le PSU, le PADS et le CNI). Le reste devant être répartis entre les «fa3aliyat» (personnalités) également triées sur le volet par les camarades de Khadija Ryadi et Abdelhamid Amine.
Et bien avant ce congrès, Annahj a pris toutes les précautions pour éviter les mauvaises surprises. Cela s’est passé d’abord en opérant une autre OPA sur la commission préparatoire du congrès, puis lors du choix de la présidence de ce 11e conclave.
Ainsi, la commission préparatoire de ce 11e congrès a été accaparée par Annahj et la présidence a également été confiée au noyau dur de cette formation politique. Sur huit membres qui siègent dans la présidence du congrès, cinq appartiennent à Annajh : Abdelhamid Amine, Abdelilah Benabdeslam, Aymane Aouidy, Khadija Inani et Khadija Ryadi. Pour donner un semblant de diversité, les leaders d’Annahj ont opté pour un seul membre du PSU, un seul représentant du PADS et un pro-Polisario, tous trois connus soit pour être conciliants avec Annajh, soit pour être de fervents défenseurs des thèses de ce parti. Dans le choix de ces personnalités, Annahj a pris le soin d’opter pour des militants qui lui sont acquis. Qui dit mieux?
Mais la grande pièce de théâtre va se jouer dans la scène finale de ce 11ème congrès suivant un scénario écrit à l’avance. De sources informées, Le360 a appris que deux scénarios ont déjà été échafaudés dans les coulisses pour garder l’AMDH sous l’aile du parti du Marteau et de l’enclume.
Le premier scénario consiste à réformer les statuts de l’ONG pour permettre au président sortant de briguer un cinquième mandat au Bureau national et de ce fait devenir éligible pour un autre mandat de président, le poste de SG revenant, dans ce cas, à l’avocat Tayeb Madmad.
Si cet amendement ne passe pas, un deuxième scénario (le plus plausible) prévoit l’élection à la présidence de l’AMDH de Khadija Inani.
En un mot comme en mille, un congrès déjà tranché et une démocratie de façade. On peut s’étonner très légitimement comment l’AMDH n’applique pas les principes élémentaires de la démocratie, alors que cette ONG passe son temps à en pointer les manquements ailleurs. A quoi sert un congrès censé élire le nouveau président de l’AMDH, alors que ce dernier est déjà désigné à l’avance ? Cette mascarade vise un grand objectif : garder la main sur les juteuses finances de l’AMDH.
One million DH bye-bye!Selon les informations de Le360, l’AMDH.SA, ONG d’utilité publique, est plus que prospère. Ses financements proviennent essentiellement de l’étranger, à raison de 90%. Et ces financements ont carrément explosé juste avant le Printemps arabe, en 2010. En 2011, les finances de l’AMDH ont quintuplé par rapport à 2010. Vous avez bien lu, c’est du 500%! Et, en 2012, cette croissance était à quatre chiffres: 2100% par rapport à 2010!
Quand l’AMDH a été pressée de déclarer ses financements comme le stipulent les lois nationales, elle s’est exécutée, mais de manière très étrange. Les montants déclarés à la Cour des comptes sont supérieurs à ceux transmis au Secrétariat général du gouvernement (SGG) de l’ordre de 13.5 millions de dirhams ou un milliard, trois cent cinquante millions pour ceux qui comptent en centimes. Dans quelles poches a atterri la différence ? A quoi ont servi les 13.5 MDH ? A financer Annajh et son organe de presse? Seuls les dirigeants de ce parti le savent.
Un agenda hostile à l’intégrité territorialePour revenir aux financements étrangers, tout le monde sait que c’est celui qui déteint les liens de la bourse qui dicte sa loi et la marche à suivre. Et l’AMDH s’exécute docilement. Elle est de toutes les «causes» susceptibles de contrarier les autorités, quitte à aller à l’encontre des intérêts supérieurs du pays.
Sachant que les Marocains dans leur totalité ne font aucune concession sur le Sahara, les dirigeants de l’AMDH ont choisi, à l’occasion de ce 11ème congrès, une formule ambiguë pour remplacer le droit à l’autodétermination que Annajh défend par «démocratisation du Sahara». Une formule qui ne saurait tromper personne, parce que les masques sont tombés il y a longtemps.
La preuve, lors du 2ème congrès de Annajh en 2008, un message sonore de Mohamed Abdelaziz (patron du Polisario) à l’adresse des congressistes a été diffusé. Lors du 3ème congrès de Annajh en 2012, le communiqué final parle dans le paragraphe 15 du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Pour ce 11e congrès, Le360 apprend aussi que 60% des participants issus des régions du Sahara sont des pro-Polisario qui proclament leur séparatisme. De là à lier la manne financière qui pleut sur l’AMDH et ses positions hostiles au Sahara, il n’y a qu’un pas très facilement franchissable lorsqu’on sait que Annajh contrôle de bout en bout cette ONG. Les militants d’Annajh sont d’ailleurs davantage intéressés par cette ONG et les indemnités généreuses pour toute mission ou déplacement que par leur parti.
A signaler que toutes les dépenses des militants de Annajh qui participent au 11e congrès sont pris en charge par l’AMDH.
Résultat du contrôle de l’AMDH par Annajh ? L’ONG a dévié de sa mission d’origine qui est celle de faire du monitoring et surveiller le respect des Droits de l’Homme. Ses militants (et d’Annahj) se sont transformés en activistes qui initient, organisent et encadrent des manifestations. Le parti est devenu une coquille vide (en a-t-il été autrement d’ailleurs ?). Il survit grâce à l’OPA sur l’AMDH. Une fusion-absorption forcée et minutieusement préparée depuis des années et qui va perdurer à l’issue de ce 11ème congrès.