«Ce qui se passe au sud de l’Algérie est très grave et très préoccupant», alerte Amnesty International, en réaction aux sanglants événements qui secouent les régions de Ghardaïa et Touggourt. «La répression disproportionnée n’est qu’un facteur supplémentaire qui aggrave la violence», a relevé l’ONG internationale, basée à Londres, par la voix de sa représentante à Alger, Hassina Oussedik, présidente de l’AGAIA (Association groupe Amnesty Algérie). Ce recadrage intervient au lendemain de la sanglante intervention policière, enregistrée le 28 novembre, contre la population de Touggourt, 160 Km au sud d’Alger, faisant trois morts tragiques parmi des jeunes d’Ouargla dont le «délit», semble-t-il, était de vouloir simplement revendiquer le raccordement de la région au réseau d’eau potable et la distribution de parcelles de terrain, comme cela avait été promis par la wilaya d’Ouargla, considérée comme le centre économique et le poumon de l’Algérie en raison des grands gisements pétroliers de Hassi Messaoud. Or, ce n’est pas de œil pacifiste que les autorités locales l’auront vu. La manifestation a été sévèrement matée par les forces de sécurité, qui ont procédé à des tirs à balles réelles, au lieu d’ «ouvrir le dialogue avec les populations», relève l’ONG de défense des droits humains, qui dénonce «une forte dégradation de la situation des droits de l’Homme» en Algérie.
Evénements de Touggourt: la FIDH s’en mêle
Le même ton dénonciateur est relevé chez la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH). Réagissant à l’intervention anarcho-policière contre la population de Touggourt, cette ONG internationale a lourdement chargé les autorités d’Alger pour ce «recours excessif à l’usage de la force», appelant, par la même occasion, à l’ouverture d’une «enquête indépendante, impartiale et transparente». Un appel, précédé d’un autre lancé, fin novembre, par des partis politiques algériens, mais resté sans lendemains, le wali d’Ouargla, Ali Bouguerra, ayant nié avoir donné le feu vert pour tirer à balles réelles sur les manifestants. Il s’agit ainsi d’un retour à la charge, mais, selon les observateurs, ce rappel n’aurait pas de chances non plus d’être entendu par des «autorités» ayant brillé par leur superbe incapacité à apporter des solutions sérieuses aux attentes du peuple algérien frère.
Ghardaïa, l’autre blessure algérienne
Dans ce registre répressif, la région de Ghardaïa n’a rien à envier à celle d’Ouargla. Pire, la population de cette région déshéritée est livrée en proie à la fois à la misère sociale et à de violents troubles intercommunautaires. La responsabilité des autorités locales dans le déchaînement de ces violences aux relents racistes a été clairement dénoncée par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme. La LADDH avait accusé les forces de l’ordre de prendre un flagrant «parti pris» en faveur des «Chaambis arabophones malékites» au détriment des «Mozabites berbérophones de rite ibadite». Une attitude jugée «scandaleuse» par la LADDH, la partialité des autorités étant épinglée comme la cause principale de cette vague de violences interethniques. 15 morts et des dizaines de blessés, sans compter les saccages des biens de la population Mozabite de rite ibadite. Bilan de l’extrême légèreté assassine d’un pouvoir algérien qui continue de bafouer la dignité de son peuple.