La communauté internationale continue d'apporter son aide au Liban suite au drame causé par l'explosion au port de la capitale Beyrouth. Le Maroc, sur instructions royales, a organisé un pont aérien pour fournir des aides alimentaires et médicales acheminées par huit avions civils et militaires, écrit le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du lundi 10 août. D'autres pays ont également envoyé des aides. D'autres encore ont entrepris d'organiser une conférence des donateurs. Des personnalités issues de tous bords ont apporté leur aide ou exprimé leur compassion.
Dans cet élan de solidarité mondial envers ce peuple meurtri, deux personnalités marocaines ont tenu à nager à contre-courant. Le salafiste Hassan El Kettani qui ravive une plaie du communautarisme que les Libanais tentent d'oublier en se désolant, dans un poste sur Facebook, que le drame ait frappé la communauté sunnite et non d'autres communautés. La deuxième personnalité n'est autre que le prince Moulay Hicham qui invite le peuple libanais à la révolte. Deux réactions fort déplacées que les Marocains eux-mêmes ont d'ailleurs vivement condamnées, constate le quotidien.
La presse libanaise a réagi énergiquement à l'appel à la révolte du prince, l'invitant à se comporter comme son cousin, le roi Mohammed VI, qui s’est empressé d’ordonner l’envoi des aides, à peine le drame survenu. «Alors que tout le Liban est meurtri, que sa capitale et sa banlieue sont détruites, voici que le prince appelle le peuple libanais à se rebeller contre le pouvoir pour réaliser la transition», s’indigne le Lebanon Press, cité par Al Ahdath Al Maghribia. Publiant avec son poste sur Facebook une photo de sa famille, côté maternel, datant des années 50, le prince s'est permis de donner des leçons de gouvernance à un pays qui connaît déjà, en plus de la crise sanitaire due à la pandémie du coronavirus, une crise économique et financière aiguë.
Pour la presse libanaise, cet appel du prince Moulay Hicham n'est aucunement productif. «Pourquoi ces appels à la rébellion? Ce qui se passe aujourd'hui en Syrie, en Libye et au Yémen et ce que les peuples de ces pays vivent à cause d'appels similaires à la rébellion, dans lesquels ils ont cru, ne suffit-il pas? Et en quoi les problèmes internes du Liban vous concernent-ils?», s'interroge le Lebanon Press, s'adressant au prince.
Quant au Cheikh salafiste, Hassan El Kettani, sa réaction a soulevé d'autant plus de ressentiments qu'elle rappelle au peuple libanais un passé douloureux à peine enterré, note le quotidien. D'ailleurs, les Libanais ne sont pas seuls à être affectés par ce genre de réactions, qui touchent tous ceux qui croient dans les valeurs humaines universelles. Le salafiste se désole uniquement parce que l'explosion a affecté un territoire à dominante sunnite. En d'autres termes, relève Al Ahdath Al Maghribia, le sort des autres communautés lui est indifférent. Cette sortie lui a valu une vive réplique d’un ancien salafiste, Mohamed Abdelouahab Rafiki, aujourd’hui chercheur dans le domaine des études islamiques.
Pour ce dernier, «tant que nous nous accrochons encore à l'idée que nous sommes mieux que toutes les autres nations, que nous nous croyons le peuple élu et que nous croyons détenir la vérité absolue, nous continuerons de subir ce genre de réactions et de commentaires qui ne font qu'attiser le sentiment de rejet et de haine». Le pire, poursuit-il, est que ces discours interviennent dans des moments de désolation où, au contraire, ce sont les actes de solidarité et de compassion qui sont naturellement les plus attendus de tous.