Les magistrats de la Cour des comptes ont débarqué la semaine dernière dans les locaux de l’Agence nationale des eaux et forêts pour une mission d’audit.
Selon Al Akhbar de ce jeudi 4 juillet, les membres de cette mission s’intéressent particulièrement aux marchés de boisement et reboisement passés par l’Agence, marchés qui ont fait l’objet d’un vif débat, même dans l’hémicycle de la Chambre des représentants.
Le quotidien affirme que les magistrats de la Cour des comptes se sont installés dans un bureau de la Direction des risques climatiques et environnementaux, en charge de la gestion des risques de feux de forêts et des opérations de reboisement.
Ils ont demandé à examiner les dossiers relatifs à la stratégie «Forêts du Maroc 2020-2030», précise Al Akhbar, et ont aussi demandé à examiner l’ensemble des données liées à la gestion des pépinières et à la production des plants utilisés dans les opérations de reboisement.
Le Haut-commissariat aux eaux et forêts, devenu depuis 2022 l’ANEF, avait exposé, en 2020, les défis auxquels cette activité est confrontée: surexploitation, pression sur les ressources naturelles, et leurs effets sur le changement climatique, indique le quotidien.
En l’absence de la mise en place d’une stratégie, avait expliqué le Haut-commissariat, le programme de développement rural serait compromis. C’est la raison pour laquelle la stratégie «Forêts du Maroc 2020-2030» avait été initiée le 13 février 2020.
Trois années après le lancement de cette stratégie, les objectifs fixés en termes de superficies annuellement reboisées n’ont toujours pas été atteints.
La stratégie prévoit, en effet, de reboiser une superficie de 60.000 hectares chaque année, pour atteindre un objectif de 600.000 hectares en 2030.
L’ANEF est encore loin de cet objectif, avec à peine 38% de ce qui aurait dû être réalisé au cours de ces trois dernières années, écrit Al Akhbar, ce qui représente une superficie reboisée de seulement 75.000 hectares.
Pour l’ANEF, ce retard est dû au non-aboutissement de certains marchés publics initiés, ainsi qu’aux oppositions d’habitants, lors des opérations de reboisement.
Le quotidien évoque, en plus, le mode de gouvernance de l’Agence et fait allusion à de probables détournements de marchés publics, comme des marchés remportés par une société qui appartiendrait à un membre du Conseil d’Administration de l’Agence.
Faisant référence à des plaintes qui ont été déposées à ce propos, le quotidien affirme qu’un budget de plusieurs dizaines de millions de dirhams est réservé à l’achat de plants, dont les prix à l’unité ont été «gonflés».
L’Agence se fait ainsi facturer à trois dirhams des plants qui ne coûtent réellement que 80 centimes, assure Al Akhbar.
Reprenant le contenu de certains documents auxquels il a pu avoir accès, le quotidien affirme que des marchés de fourniture de millions de plants d’arbres chaque année ont été passés, «sans prévoir des trous pour les planter», écrit le quotidien.
De fait, à peine 30% des plants ont été plantés, et «le reste est détruit», explique aussi Al Akhbar.
Les entreprises forestières, indique le quotidien, ont appelé à la création d’une commission d’enquête pour recenser les plants d’arbres plantés et les comparer au nombre de plants achetés par l’ANEF.
Plus encore, indique Al Akhbar, l’Agence a abandonné ses pépinières, et a commencé à conclure des marchés pour la production de 40 à 50 millions de plants d’arbres par an.