Des dirigeants de premier rang du Parti de la Justice et du développement n’ont cessé de le crier sur tous les toits, filtrant des rumeurs voulant que le parti islamiste se soit mis le ministère de l’Intérieur dans la poche, en le poussant à maintenir un statut quo dans les lois électorales qui favorisent le cumul des mandats. Un cumul qui sert en premier lieu le PJD, premier à en profiter et à s’en servir. Il n’en sera rien, nous informe Assabah dans son édition du mercredi 30 septembre.
Le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, vient en effet d’opposer un niet catégorique au plaidoyer du PJD, sous forme de mémorandum et dans le cadre de la réforme prévue des lois électorales, un exercice classique précédant les prochaines Communales et Législatives. Répondant favorablement à l’appel de 24 autres partis qui, eux, militent pour un changement radical afin d’éviter au maximum le cumul des mandats, l’intérieur a tranché. La réforme sera ainsi globale et profonde. La multiplication des cas possibles d’incompatibilité pour barrer la route à tout potentiel cumul de mandats et de fonctions sera au coeur des objectifs.
La finalité est de tracer des frontières claires entre les fonctions parlementaires, donc législatives, l’action locale basée sur la proximité et les mandats ministériels relevant, eux, de l’Exécutif. Une question de cohérence, au final, vu que la Constitution stipule clairement une séparation nette entre les différents pouvoirs. «Le régime constitutionnel du royaume est fondé sur la séparation, l’équilibre et la collaboration des pouvoirs», peut-on lire d’entrée.
Des sources citées par Assabah indiquent qu’une telle distinction entre les pouvoirs et la multiplication des cas d’incompatibilité vont couper l’herbe sous le pied de bien des dirigeants du PJD qui brillent par l’accumulation des attributions et pouvoirs. Ainsi en est-il de certains qui sont à la fois maires dans des villes, ministres dans le gouvernement, membres du Parlement et de Conseils communaux, parlementaires et membres de Chambres professionnels. Et les exemples sont nombreux.
«Au point que le PJD est devenu le parti politique le plus riche du Maroc en termes de rentrées administratives (puisque toutes ces fonctions sont plus ou moins généreusement rétribuées, NDLR). Des rentrées autorisées et largement gonflées du temps de l’ancien chef du gouvernement Abdelilah Benkirane, au demeurant ancien secrétaire général du même parti de la Justice et du développement», lit-on.
Certains cumuls de fonctions, et donc de dédommagements, ont atteint jusqu’à 70.000 dirhams par mois pour certains, et ce contre peu ou pas d’action, dénonce le leader d’un parti politique, cité par le journal sous couvert d’anonymat.
La réforme en vue que l’Intérieur va soumettre au vote du Parlement repose sur des rapports accablants, dits «noirs», faisant état du cuisant échec des élus et autres responsables ayant cumulé plusieurs mandats. Une question de concentration en somme. Tout comme ces rapports indiquent clairement que cette démarche est devenue une source d’enrichissement personnel, au lieu de servir la chose publique.
«Ce phénomène a atteint une telle dimension que certains walis et gouverneurs n’ont pas jugé utile de faire appel aux contributions éventuelles des élus, présidents de communes ou de circonscriptions, pour la gestion de certaines urgences importantes, comme celles en lien avec le coronavirus, sachant que ces derniers étaient occupés à prospérer et pris par autre chose que la recherche de l’intérêt commun», lit-on encore dans Assabah.
Faut-il, après cela, se plaindre de la perte de confiance des Marocains vis-à-vis de leurs élus et ministres?