C’est au plus fort de la crise franco-marocaine que l’Espagne a abattu ses cartes. On ne mord pas la main qui (nous) a été tendue pour sauver des vies innocentes, semble dire Madrid à Paris, en décernant, en ce glorieux jeudi 23 octobre, l’une de ses plus prestigieuses distinctions au patron de la Direction générale de la surveillance du territoire national, Abdellatif Hammouchi. «Après l’injustice faite par la France au patron de la DGST, quand elle l’avait convoqué, en cet exécrable février dernier, pour répondre de faux actes de tortures, voilà que Madrid le réhabilite et lui remet l’une des plus hautes distinctions», relève Al Ahdath Al Maghribia, dans son édition de ce vendredi 24 octobre. «Abdellatif Hammouchi décoré de la croix honorifique de mérite policier avec distinction rouge en reconnaissance du rôle joué par la DGST dans le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde», fait valoir le quotidien, en précisant que cette haute distinction espagnole sous-tend à la fois un message de gratitude à l’égard du renseignement marocain pour son excellent rôle notamment dans la lutte antiterroriste et, par ricochet, un cinglant pied de nez aux autorités françaises pour avoir grillé la politesse au patron de la DGST en inventant à son encontre des allégations de torture et de complicité de torture.
Même tonalité relevée chez Akhbar Al Yaoum, qui détecte à travers la distinction du patron du contre-espionnage marocain «un cinglant camouflet infligé à la France» pour avoir vainement tenté d’«humilier» le premier responsable de la DGST. «La croix honorifique de mérite policier avec distinction rouge est l’une des plus hautes récompenses décernées à des personnalités étrangères», met en relief le quotidien, en soulignant que deux autres directeurs centraux du service de contre-espionnage intérieur marocain ont reçu deux autres «croix honorifiques avec distinction blanche». Seulement voilà, fait constater le quotidien, ni les noms ni les photos des deux responsables de la DGST n’ont été révélés, ce qui laisse la porte ouverte aux supputations. Selon Akhbar Al Yaoum, il s’agirait de Mohamed Raji, contrôleur général de la DGST, et Tawfik Sayegh, officier régional.
La DGST au secours de l’Espagne !
«La sécurité de l’Espagne et de nos frontières, la lutte contre les réseaux de trafic des êtres humains, la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue dépendent énormément de la coopération extrêmement importante avec le Maroc». Ces propos, tenus par le Secrétaire d’Etat espagnol à la Sécurité, Martinez Fransisco Vasco, lors de la cérémonie de décoration du parton de la DGST, sont largement relayés par les principaux titres de la presse nationale. A juste titre, d’ailleurs. «L’Espagne découvre une mine intarissable de renseignements nommée Hammouchi», relève Akhbar Al Yaoum. En effet, la DGST a réussi à arrêter plus d’une quarantaine de personnes qui menaçaient la sécurité de l’Espagne et du Maroc, sans compter leur rôle déterminant dans le démantèlement de plusieurs cellules terroristes actives dans les villes de Fnidek, Tétouan, Fès et dans les régions avoisinant Sebta et Mellilia», met en exergue le quotidien.
France, grand coup de théâtre !
«Décoration de Hammouchi en Espagne et des plaintes en France sous le coup de l’annulation pour vice de forme», révèle Al Massae, dans sa livraison de ce vendredi 24 octobre. En rappelant que la distinction du patron de la DGST avait été annoncée par l’Espagne le 8 octobre, à l’occasion de la célébration de la journée de la Police, le quotidien dévoile que la poursuite contre Hammouchi en France est en passe d’être annulée pour «vices de forme sur dépôt de plainte». Vrai, faux, le mal est pourtant fait. Et le réchauffement des relations entre Rabat et Paris n’est pas pour bientôt. C’est du moins ce que laisse penser la dernière sortie du Quai d’Orsay quand il a lancé cette «pique» selon laquelle le Maroc souffrirait de failles sécuritaires. Ce qui lui a valu une cinglante mise au point du ministre Mohamed Hassad. «Les failles sécuritaires enregistrées en France sont bien plus nombreuses que celles relevées au Maroc». Ce n’est pas Madrid qui dira le contraire.