La réforme fiscale locale au cœur d’un conflit d’influence entre les ministères de l’Intérieur et des Finances

Abdelouafi Laftit, ministre de l'Intérieur.

Revue de presseLa mise en œuvre de la loi n°14-25, destinée à réformer la fiscalité des collectivités territoriales, provoque de vives tensions au sein des services de la Trésorerie générale. Entre transfert de compétences, mutation des personnels et redéfinition des tutelles, cette ambitieuse refonte se heurte à l’inquiétude des fonctionnaires et à un conflit d’influence latent entre les ministères de l’Intérieur et des Finances. Cet article est une revue de presse tirée d’Al Ahdath Al Maghribia.

Le 23/11/2025 à 17h44

Sur instruction de Abdelouafi Laftit, ministre de l’Intérieur, une circulaire a été adressée aux walis et gouverneurs pour l’application de la loi n°14-25 relative à la fiscalité locale. Cette directive a provoqué un climat de vive tension au sein des services administratifs de la Trésorerie générale.

Le texte ministériel insiste sur l’impérative application des dispositions relatives au recouvrement des impôts et acte le transfert intégral de la gestion de toutes les taxes au profit de 92 nouvelles perceptions communales, rapporte Al Ahdath Al Maghribia dans son édition de ce lundi 24 novembre. Un délai de six mois, non renouvelable, a été imparti aux anciennes perceptions pour libérer leurs locaux. Parallèlement, un transfert immédiat des archives, des données informatiques et des dossiers de litiges de la Trésorerie générale vers les nouvelles entités est exigé.

Cette restructuration profonde s’accompagne d’une reconfiguration des effectifs, avec la convocation de 335 fonctionnaires à une formation obligatoire préalable à leur intégration sous l’autorité des présidents de communes. Une mesure qui suscite une profonde inquiétude parmi les agents du ministère des Finances, qui y perçoivent une menace pour leur statut professionnel et une atteinte à leur situation juridique et administrative. Nombre d’entre eux redoutent de devenir, de fait, dépendants du ministère de l’Intérieur.

Entrée en vigueur en juin 2025, cette loi s’inscrit dans le sillage des réformes visant à moderniser le système fiscal local. Elle opère une redistribution des rôles entre l’Intérieur et les Finances, confiant à la Direction Générale des Impôts la gestion de trois taxes locales: la taxe professionnelle, la taxe d’habitation et la taxe de services communaux. Elle introduit également une nouvelle méthode de calcul pour la taxe sur les terrains non bâtis, indexée sur le niveau d’équipement de chaque zone. Le ministère de l’Intérieur espère ainsi améliorer l’efficacité du recouvrement par la numérisation des procédures et l’élargissement de ses prérogatives.

Cependant, les syndicats soulignent avec insistance que la réussite d’une telle réforme passe nécessairement par l’élaboration de solutions «équitables» pour les fonctionnaires, véritables pivots de cette transformation, note Al Ahdath Al Maghribia. Ils estiment que ce qui était un projet technique a muté en un «conflit d’influence et de compétences» entre les deux ministères, notamment face à l’extension du périmètre du ministère de l’Intérieur. La tension actuelle, si elle n’est pas apaisée par un dialogue clair sur le sort des ressources humaines, pourrait bien compromettre le calendrier même de cette ambitieuse réforme.

Par Hassan Benadad
Le 23/11/2025 à 17h44