Nouveau rebondissement dans l’affaire des magistrats poursuivis pour avoir exprimé des points de vue sur les réseaux sociaux. L’on se rappelle que l’inspection générale du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ) avait convoqué, il y a environ une dizaine de mois, quatre magistrats pour qu’ils s’expliquent sur leur violation présumée du droit de réserve à travers des publications sur leurs pages Facebook, publications supposées contenant des «expressions» qui visent également le CSPJ.
Selon le quotidien Al Massae du mardi 8 juillet, la nouvelle décision du CSPJ, qui a nommé, dimanche dernier, un rapporteur chargé d’ouvrir une procédure disciplinaire contre les quatre magistrats présumés fautifs, a créé une vive colère au sein de la profession.
Ainsi, Abdellatif Chennouf, président du Club des magistrats du Maroc, affirme que cette «affaire relève d’abord et avant tout de la liberté d’expression garantie par la Constitution de 2011, mais aussi juridiquement, à tous les magistrats». Il regrette que le CSPJ ait fait monter la tension d’un cran, surtout que cette institution était en consultations permanentes avec le Club des magistrats et que les deux parties s’étaient engagées à organiser des rencontres régulières en vue de résoudre cette affaire et sauvegarder la bonne image du corps de la magistrature.
Abdellatif Chennouf, tout en estimant que la sagesse peut toujours l’emporter dans ce dossier, n’en a pas moins exhorté les magistrats marocains à ne pas céder un seul iota de leur droit à la liberté d’expression. Il les a également appelés à soutenir les quatre magistrats poursuivis, surtout, explique-t-il, que les publications sur facebook qui leur sont reprochées n’ont porté atteinte ni à des institutions, ni à des individus.
Pour sa part le quotidien Assabah rappelle que les quatre magistrats poursuivis sont Abderrazak Jebbari, secrétaire général du Club des magistrats du Maroc, Driss Maatalla, membre du Conseil national du Club, Bekkali Afif, représentant régional du Club à Laâyoune, et Fathallah El Hamdani, membre du Club. C’est le procureur général près la Cour d’appel d’El Jadida qui a été désigné pour enquêter avec ces quatre magistrats.
En vertu de l’article 89 du statut du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, ce procureur doit permettre aux magistrats poursuivis d’avoir accès au dossier détaillant les griefs qui leur sont reprochés, tout en leur fixant une date de convocation pour venir s’expliquer. Les «prévenus» ont le droit de refuser de fournir toute explication, laissant au juge du CSPJ la latitude de les sanctionner (blâme ou suspension) ou non.
En attendant, ajoute Assabah, le Club des magistrats du Maroc a publié sur sa page facebook, en guise de solidarité, les photos des quatre magistrats tout en rappelant qu’ils sont protégés par l’article 111 de la Constitution, garant de la liberté d’expression des magistrats.