Les walis, les gouverneurs et la tutelle: une vieille polémique qui vient d’être remise au goût du jour par les députés PJD. Cela s’est passé mardi, lors de l’examen détaillé des trois projets de lois relatifs aux terres Soulaliyates par la commission de l’Intérieur à la première Chambre. Un échange virulent a alors eu lieu à ce sujet entre le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, et les députés islamistes, rapporte le quotidien Assabah dans sa livraison du jeudi 27 juin.
Le ministre, qui a passé trois heures à expliquer la teneur et la portée de ces projets de lois aux représentants de la Nation, s’est dit étonné, pour ne pas dire offusqué, de voir les députés du PJD mettre en doute la «tutelle» exercée par le ministère sur ces terres collectives, relève le quotidien. Le ministre a été ferme et franc en s’adressant aux parlementaires islamistes qui se sont mobilisés contre lui. «Nous avons de plus en plus le sentiment que l’on s’achemine vers une perte de confiance en tout ce qu’entreprend l’Etat. Et cela est très dangereux», a-t-il notamment lancé à leur adresse. «A chaque fois que je viens ici, je sens un certain manque de confiance, pour ne pas dire une mauvaise foi, et la nuance est grande entre les deux», a-t-il encore ajouté.
Aux députés qui ont exigé la levée de la tutelle du ministère sur ces terres, il également rétorqué: « Je vous jure que sans la tutelle du ministère, il ne serait pas resté un seul pan de ces terres qui doivent aujourd’hui êtres mises au service de l’investissement et du développement». Bref, pour le ministre, ces projets de lois «ne peuvent pas passer sans le maintien de la tutelle et des pratiques coutumières d’usage». «Quitte à ce que ces textes ne soient pas votés», tranche-t-il. En d’autres termes, les trois textes passeront avec la tutelle ou ne passeront pas.
Cela dit, l’important, ajoute le ministre, est de débattre de la manière dont ces terres pourraient créer de la richesse au lieu de polémiquer sur la tutelle qui ne sera jamais levée, tout comme ne seront jamais abrogées les coutumes qui consistent en la distribution d'aides financières aux ayant droits. De toutes les manières, assure-t-il, si l’ont supprimait cette coutume, ce qui ne peut intervenir du jour au lendemain, nous nous retrouverions face à de graves problèmes que nous ne saurons pas résoudre.
Dans cet échange avec les députés du PJD, le premier parti de l’opposition, le PAM, a pris cause et fait pour le ministre, «non pas pour un quelconque intérêt personnel», assure le député Addi Bouârfa qui est intervenu en son nom, mais pour rappeler que «le ministère de l’Intérieur n’est plus ce qu’il était» et qu’il faudrait prendre en compte cette donne. A travers son député d’Errachidia, le PAM a donc soutenu le maintien de la tutelle de l’Intérieur sur ces terres.
Pendant ce temps, écrit pour sa part le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du même jour, le ministre de l’Agriculture, Aziz Akhannouch, et le secrétaire d’Etat à l’Intérieur, Noureddine Boutayeb, ont donné le coup d’envoi, mercredi, de l'opération pilote de «melkisation» de 67.000 hectares de terres collectives situées dans les périmètres d’irrigation du Gharb et du Haouz. Cette opération bénéficiera à plus de 30.000 agriculteurs pour les inciter à jouer pleinement leur rôle économique, précise le journal.
L’opération, affirme le ministre de l’Agriculture, cité par le journal, «s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des orientations royales relatives aux terres collectives». Elle est financée par le Millennium Challenge Corporation (MCC, Compact II) à hauteur de 33 millions de dollars et constitue, ajoute le ministre, «une vraie révolution en termes de célérité et de procédures». Il s’agit, explique Aziz Akhannouch, d’une «opération de grande envergure, qui marque la naissance d’une nouvelle dynamique dans l’action de l’Etat et sa volonté de donner un nouvel élan à l’assainissement de la situation juridique des terres collectives en particulier, et du foncier agricole en général».
Le ministre a, par ailleurs, précisé que la melkisation de 80% des 67.000 hectares de terres collectives, prévue dans le cadre de cette opération pilote, a nécessité un travail de traitement de 14 mois là où, auparavant, ce type de procédure nécessitait entre 5 et 7 ans. Les 20% restant seront traités dans un délai de 3 mois, a-t-il assuré. Cette réduction des délais a été possible grâce à plusieurs facteurs, notamment la synergie et la coopération rapprochée entre les intervenants, dont les services du ministère de l’Intérieur, les services régionaux du ministère de l’Agriculture et la Conservation foncière.