L’opposition n’est pas un fourre-tout pour les partis dont le chef de file de la majorité n’en aura pas voulu. Dans toute démocratie, comme il y a une majorité, il y a également une opposition. Cela vaut aussi pour le Maroc. Même plus, les partis politiques qui vont incarner l’opposition durant les cinq années à venir sont en passe de vivre un tournant aussi sensible qu’historique. Aujourd’hui, nous sommes, en effet, face à deux alternatives, écrit le quotidien Assabah dans l’édito de son numéro du lundi 20 septembre.La première alternative veut que l'opposition, tout en ayant assimilé la nature et l’importance de son rôle, s’acquitte pleinement de sa mission centrale fixée par la Constitution, tout en donnant à cette mission le véritable contenu politique qui est le sien. C’est une lourde responsabilité.
La deuxième éventualité que personne ne voudrait même pas envisager c’est de laisser le terrain vide à l’opposition de la rue, ce qui est synonyme d’un dur revers politique. Ce dont le Maroc n’a évidemment pas besoin.
C’est pour dire, poursuit l’éditorialiste d’Assabah, que l’opposition est une affaire très sérieuse. Ce n’est pas une plaisanterie. Or, on a justement tendance à minimiser la chose. On avance ici et là des arguments à la limite niais qui veulent que le fait de renvoyer un parti à l’opposition reviendrait à le tuer symboliquement. Dans l’opposition on est loin des centres du pouvoir et de l’action et on perd en attractivité et en influence, estime-t-on. Certains avancent même que l’opposition est une punition qu’on voudrait infliger à une formation ou une autre ou une voie de garage vers laquelle on renvoie certaines parties indésirables.
Ce genre d’arguments est irresponsable. Et le plus grave c’est qu’ils sont avancés par des leaders politiques. Ces mêmes dirigeants qui sont, pourtant, censés être au fait de l’évolution des choses, de la conjoncture et surtout de la place que la Constitution réserve à l’opposition institutionnelle dans la vie politique et publique en général. L’opposition joue, en effet, un rôle central dans l’action parlementaire et fait du Parlement non plus une simple institution, mais un véritable pouvoir à part entière. Un pouvoir qui ne peut jouer pleinement son rôle, ou même subsister, sans cet équilibre entre la majorité et l’opposition.
Ceux qui veulent aujourd’hui faire partie, à tout prix, de la coalition gouvernementale ignorent sans doute, ou du moins font semblant d’ignorer, la longue liste des droits et attribution que la Constitution a accordés à l’opposition parlementaire. Des droits aussi étendus qu’ils égalent parfois ceux de la majorité. Et cela afin de prévenir toute possibilité que la contestation, à défaut de s’exprimer au sein des institutions, soit portée par la rue, comme ce fut, d’ailleurs, le cas un certain 20 février 2011.
C’est justement pour permettre à l’opposition de s’exprimer non plus dans la rue mais au sein des institutions, au Parlement notamment, que la Loi fondamentale du pays accorde à juste titre à cette opposition institutionnelle tous les pouvoirs dont elle a besoin pour accomplir sa mission. Elle jouit, depuis 2011, rappelle l’éditorialiste, de pouvoirs étendus en matière législative, d’une plus grande capacité de contrôler le gouvernement y compris via les commissions d’enquête et même la motion de censure, en plus, bien sûr, de la possibilité de présider l’une des commissions les plus importantes, celle de la législation.
Que certains partis politiques, conclut l’éditorialiste, ignorent ou font semblant d’ignorer cette panoplie de droits et pouvoirs dont est investie l’opposition, et la large palette d’instruments de contrôle dont elle dispose, cela prouve que ce n’est pas l’intérêt général qui les motive. Au contraire, pour beaucoup, ils ne cherchent qu'à placer leurs proches et amis aux différents postes de responsabilité. Or, comme la majorité est censée travailler sur les dossiers relatifs à la gestion publique, l’opposition, elle, doit porter devant les institutions la voix des citoyens, leurs doléances et leurs attentes.