Quatre ans et sept mois après la présentation par le gouvernement du projet de loi d’amendement du code pénal au Parlement, les députés ont échoué, une fois encore, à faire voter ce texte. Les partis politiques ont toujours du mal à accorder leurs violons sur la question des libertés individuelles. Encore faut-il préciser que chacun défend sa vision sur ce sujet à travers les slogans brandis lors des meetings partisans. Selon des sources autorisées, les directions des partis ont refusé de s’aventurer sur le terrain de l’amendement du CP, de peur de perdre leur électorat conservateur. D’autant que cet important électorat, composé de catégories sociales précaire, pauvre et moyenne, risque de tourner le dos aux modernistes lors des élections de 2021. C’est d’ailleurs la raison principale qui a poussé les groupes parlementaires à reporter, à maintes reprises, le vote de ce projet de loi.
Lors d’une rencontre parrainée, samedi dernier à Salé, par le MP sur les libertés individuelles, les chefs de partis ont exprimé leur déception de n’avoir pu interagir avec les nouvelles valeurs adoptées par la société marocaine. Le Secrétaire général de l’UC, Ahmed Sajid, a reconnu que le gel du projet du code pénal met dans l’embarras la classe politique. Et Sajid de poursuivre: «Les positions des uns et des autres ne sont pas claires, aussi bien au sein de la sphère politique que dans la société marocaine. La confusion sur des sujets sensibles risque de causer des problèmes politiques et électoraux. C’est pour cela qu’il faut les aborder avec courage sans les expliquer, toutefois, par une atteinte aux fondamentaux du pays».
Le quotidien Assabah rapporte, dans son édition du mardi 3 décembre, que le secrétaire général du MP, Mohand Laenser, souligne que «le débat actuel sur le code pénal ne signifie aucunement qu’il faut prendre une position absolue car, à l’intérieur des partis, les opinions sont, dans une large mesure, très divisées». Laenser va au delà de la classe politique pour expliquer la complexité du sujet des libertés individuelles en soulignant que «les juges et les forces publiques sont embarrassés quand on leur présente certains cas, notamment ceux ayant trait, justement, aux libertés individuelles. Autant dire que l’idée d’un consensus semble absolument impossible». Pour sa part, le Secrétaire général du PPS, Nabil benabdellah, indique que, «dans la situation actuelle, le Maroc n’a pas besoin de constituer deux camps opposés sur des sujets pareils, car le plus grand combat consiste à lutter contre la pauvreté et le chômage ».
Le ministre d’Etat chargé des droits de l’Homme, Mustapha Ramid, a préféré entrer dans les détails en déclarant que la loi marocaine ne sanctionnait pas la conversion religieuse. Mais, précise-t-il, «la loi punit celui qui cherche à porter atteinte à la foi d’un musulman par un prosélytisme religieux et à travers l’exploitation des gens marginaux et des enfants. En définitive, le concept qui domine est que chacun est libre de croire ou de ne pas croire». Quant aux relations sexuelles consenties entre un homme et une femme, Ramid a été on ne peut plus explicite en affirmant que «l’Etat n’a pas le droit de s’introduire par effraction dans l’espace privé, d’espionner et d’enfoncer les portes des adultes pour transgresser leur intimité». La question de ne pas observer le jeûne pendant le Ramadan a de même été évoquée par le ministre. Pour lui, «la rupture du jeûne pendant la journée relève aussi de l’espace privé. Tout un chacun a le droit de pratiquer ses convictions comme il le veut, à condition qu’il le fasse dans un espace fermé». Pour ce qui est de l’interruption volontaire de grossesse, Ramid a souligné que cette question avait été tranchée par un consensus entre les différentes institutions concernées, sur la base des conclusions de la commission royale.