Lors d’une réunion extraordinaire, organisée sous le sceau de l’urgence dans la soirée du 11 décembre à Rabat, le Parti de la justice et du développement (PJD) a pris ouvertement, à travers un communiqué signé par son SG et chef du gouvernement, Saâd-Eddine El Othmani, la défense de son élu à la Chambre des conseillers, Abdelali Hamieddine, convoqué récemment par la Chambre criminelle près la Cour d’appel de Fès pour répondre de son implication dans un homicide volontaire avec préméditation. Il s’agit, en fait, de la réouverture du dossier du meurtre de l’étudiant gauchiste Mohammed Ait El Jid Benaïssa, assassiné le 25 février 1993, à Fès, par des étudiants islamistes sur le campus de l’Université Dhar El Mehraz.
Pour le quotidien Al Ahdath Al Maghribia de ce mercredi 12 décembre, «qu’un parti qui dirige l’actuelle majorité gouvernementale se réunisse d’urgence, et qu’avec le ministre des Droits de l’homme de ce même parti ils s’en prennent à une décision souveraine de justice, cela pose un grave problème: celui de l’ingérence d’un parti politique dans les affaires de l’institution judiciaire.»
Mustapha Ramid, ministre d’Etat aux Droits de l’Homme et ancien ministre de la Justice, a été le premier à réagir officiellement à cette nouvelle affaire dans laquelle est impliqué Hamieddine, à travers un post sur sa page Facebook. C’est d’ailleurs ce même post qui a été repris mot pour mot par le PJD pour confectionner son communiqué de soutien à Hamieddine: «Le parti a appris avec une grande surprise la décision du juge d’instruction de la Cour d’appel de Fès de poursuivre Abdelali Hamieddine, alors que la justice avait déjà rendu son verdict pour ces mêmes faits en 1993». Selon Al Ahdath, Abdelilah Benkirane, ancien secrétaire général du PJD et ancien chef du gouvernement, a également réagi, mais en disant tout simplement qu’il était parfaitement d’accord avec le contenu de la «réaction de Ramid».
Pour sa part, le quotidien Al Akhbar du 12 décembre rapporte que cette affaire a fait l’objet d’une passe d’armes verbale entre le ministre la Justice, Mohamed Aujjar, et des députés du PJD qui ont décidé de l’interpeller sous la coupole quant aux «raisons de la réouverture du dossier de l’étudiant Mohamed Aït Ljid Benaïssa, sur lequel la justice s’est prononcée il y a maintenant 25 ans». Aujjar a répondu, en s’adressant particulièrement à Driss Azami, chef du groupe parlementaire du PJD à la Chambre des représentants et député-maire de Fès, qu’il n’appartenait «ni à un ministre, ni au gouvernement de s’ingérer dans les affaires de la justice, devenue une institution totalement indépendante.»
Revenant sur la réaction de Mustapha Ramid, ex avocat désigné par le PJD pour le suivi de cette affaire, le quotidien Al Akhbar lui consacre une caricature. On y voit en arrière-plan Hamieddine et, devant lui, un Ramid en justicier à la mine patibulaire, armé d’un gourdin, avec cette bulle: «Je suis le protecteur du protecteur de la religion (hami eddine)!»