Le nouveau projet de résolution sur le Sahara, qui sera soumis au vote cette semaine, est finalement tombé. Dans le draft de ce projet, dont copie est parvenue à le360, le Conseil de sécurité décide de proroger le mandat de la MINURSO pour une année supplémentaire (jusqu’au 25 avril 2019).
Au-delà des formules de rigueur, revenant comme un leitmotiv dans les différentes résolutions adoptées jusqu’ici, le présent projet sort en quelque sorte du schéma classique en bousculant les paramètres anciens voulus par Alger. Notons en passant que jamais auparavant, le Conseil de sécurité n’a appelé autant les «pays voisins» à s’impliquer et à faciliter les négociations. Tout le monde reconnaîtra l’Algérie dans cet appel insistant et réitéré, une dizaine de fois, à l’adresse des pays voisins pour trouver une solution au conflit du Sahara.
Citée en tant que «partie» dans la précédente résolution (2357), Alger est désormais appelée à «accentuer son implication dans les négociations» pour aider à solder le conflit plus que quarantenaire créé autour du Sahara. «Le Conseil de sécurité demande aux États voisins d'accroître leur participation au processus de négociation et de remplir leur rôle spécial et essentiel de soutien au processus politique», peut-on en effet lire dans le draft du projet de résolution.
Alger jamais autant pointée du doigt
Pour précision, le Maroc a toujours demandé à ce qu’Alger s’implique dans le processus de négociations pour trouver une solution réaliste au contentieux saharien, mais elle a toujours refusé d’y prendre part, prétendant que «le conflit est une question entre le Maroc et le front Polisario». Alger affirme que son soutien au Polisario est une question de «principe».
La posture d’Alger ne convainc visiblement plus grand monde. C’est un secret de polichinelle que de dire que l’Algérie arme, finance et met sa diplomatie, ainsi que sa presse au service du Polisario. Ce n’est pas avec le Polisario que le Maroc est en conflit, mais avec l’Algérie qui mobilise son budget et toutes ses institutions pour contrer l’intégrité territoriale du Royaume du Maroc.
Le Conseil de sécurité sait pertinemment qu’Alger est partie prenante au conflit et que le Polisario n’est qu’un instrument pour réaliser ses visées hégémoniques dans la région.
Même si le SG de l’ONU, Antonio Guterres, a fait l’impasse, dans son rapport présenté début avril, sur le refus d’Alger d’autoriser un recensement de la population de Tindouf, le Conseil de sécurité est revenu à la charge en «réitérant sa demande d'examen de l'enregistrement des réfugiés dans les camps de réfugiés sahraouis».
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Autre point saillant dans le projet de résolution qui, à moins d’un changement de dernière minute, sera soumis au vote ce mercredi 25 avril: les incursions répétitives du Polisario dans la zone tampon, voire sa tentative de changer le statut des localités marocaines situées à l’est du dispositif de défense marocain, entre autres Bir Lahlou, Tifariti et Mahbess. «Le Conseil de sécurité exprime sa préoccupation face aux violations des accords existants et appelle les parties à respecter leurs obligations et à s’abstenir de toute action susceptible de déstabiliser la situation ou de menacer le processus onusien», peut-on en effet lire dans le projet de résolution.
Le Conseil de sécurité met ainsi clairement sur la sellette le front Polisario, accusé directement de violer les accords de cessez-le-feu conclus en novembre 1991. «Le Conseil de sécurité réaffirme la nécessité de respecter pleinement les accords militaires conclus avec la MINURSO en ce qui concerne le cessez-le-feu et invite les parties à adhérer pleinement à ces accords», souligne le projet de résolution.
Quelques lignes plus loin, le Conseil de sécurité précise et nomme la partie adverse en se disant «préoccupé par la présence du front Polisario dans la zone tampon de Guerguerat», tout en intimant au front séparatiste de procéder à «un retrait immédiat» de cette zone vitale à l’échange commercial.
Au-delà de Guerguerat, l’instance décisionnelle de l’ONU bat en brèche l’allégation du Polisario selon laquelle les localités situées à l’est du dispositif de défense marocain seraient des «zones libérées». Le CS se déclare «préoccupé par l’annonce par le front Polisario du transfert prévu de fonctions administratives à Bir Lahlou et demande au front Polisario de s’abstenir de toute action déstabilisatrice de ce type», indique en effet le projet de résolution.
Cet article est très important et constitue une mise en garde claire à l’adresse du tandem Polisario/Algérie qui ont l’objectif de dresser des bâtiments administratifs à Bir Lahlou et de créer un nouvel ordre des choses à l’est du dispositif de sécurité.
Par ricochet, le Conseil de sécurité salue «la réponse mesurée du Maroc à cet égard». Une reconnaissance claire et nette de la sagesse du Maroc face aux provocations du Polisario, galvanisé par Alger, dans le but désespéré de changer la réalité sur le terrain.
Autre point essentiel à retenir, l’appel réitéré par le Conseil de sécurité pour la reprise des négociations, lancées en 2007 à Manhasset, en banlieue new-yorkaise, sur la base de l’offre d’autonomie. «Le Conseil de sécurité prend note de la proposition marocaine présentée le 11 avril 2007 au Secrétaire général et se félicite des efforts sérieux et crédibles déployés par le Maroc pour faire avancer le processus vers une résolution», souligne en effet le projet de résolution, indiquant «prendre également note de la proposition du front Polisario présentée le 10 avril 2007 au Secrétaire général».
Droits de l’Homme, le rôle du CNDH mis en relief
Malgré le ton un brin alarmiste qui a dominé dans le rapport du SG de l’ONU, où la main de son envoyé personnel, Horst Köhler, a pesé lourd, le Conseil de sécurité a tenu à rééquilibrer la donne en «se félicitant à cet égard des mesures prises récemment par le Maroc et du rôle joué par le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) à Dakhla et à Laâyoune, ainsi que l’interaction du Maroc avec les procédures spéciales du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies».
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Par la même occasion, le CS «se félicite de la visite technique du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'Homme (HCDH) au Sahara occidental en avril 2015 et des camps de réfugiés de Tindouf en juillet-août 2015, et encourage vivement la coopération avec le Haut-commissaire aux droits de l'Homme (HCDH), notamment en facilitant d'autres visites dans la région», peut-on encore relever dans le projet de résolution.
Côté Tindouf, il subsiste toutefois une préoccupation. Le Conseil de sécurité affirme «noter avec une profonde préoccupation les difficultés persistantes auxquelles sont confrontés les réfugiés sahraouis et leur dépendance vis-à-vis de l'aide humanitaire extérieure, et notant en outre le financement insuffisant pour ceux qui vivent dans les camps de réfugiés de Tindouf et le risque de réduction de l'aide alimentaire».
En somme, le projet de résolution interagit favorablement avec les requêtes marocaines et donne raison à sa préoccupation quant au rôle d’Alger qui n’a jamais autant été citée pour son implication dans ce conflit qui n’a que trop duré.