Depuis qu’il a succédé, en avril 2017, à l’Américain Christopher Ross en tant qu’Envoyé spécial du SG de l’ONU au Sahara, Horst Köhler, l’ancien président allemand (76 ans), a réussi à imprimer sa propre méthode à la gestion du dossier dont il a été chargé. Durant les 20 premiers mois suivant sa désignation par Antonio Guterres, Köhler a d’abord commencé par initier des rencontres séparées avec les délégations marocaine, algérienne, mauritanienne et du Polisario pour se faire une idée et esquisser une solution réaliste qui mettrait définitivement fin au vieux conflit créé autour de la question du Sahara.
Dès fin 2018, il a réussi à renouer le dialogue, interrompu depuis plus de six années, entre les différentes parties en les réunissant à deux reprises (décembre 2018 et mars 2019) autour d’une même table à Genève. La troisième table ronde du même genre, prévue mais dont la date n’avait pas été fixée, n’aura finalement pas lieu. C’est cette interruption brusque du «processus de Köhler» qui a amené Al Ahdath Al Maghribia, dans son édition du vendredi 24 mai, à s’interroger sur l’avenir des avancées importantes léguées par l’Allemand. Selon le quotidien, trois scénarios sont envisageables.
Le premier scénario, le plus pessimiste car s’apparentant au rocher de Sisyphe, consiste en un nouveau «retour au point zéro», en faisant table rase de tout ce que Köhler a accompli jusqu’ici. Ce gâchis sera d’autant plus préjudiciable que le «démissionnaire» a déjà réussi à instaurer un semblant de climat de confiance entre les parties concernées.
Le deuxième scénario, qui se veut être celui de la continuité, prévoit que le travail déjà abattu par Köhler puisse être poursuivi par son successeur, surtout que les dernières résolutions du Conseil de sécurité ont été établies sur la base des comptes rendus résumant les efforts déployés et les recommandations préconisées par l’Envoyé spécial sortant du SG de l’ONU lors de ses consultations directes avec les parties concernées, principalement le Maroc et l’Algérie, cette dernière étant désormais considérée comme partie prenante, et subsidiairement le Polisario et la Mauritanie, impliquée pour sa proximité régionale.
Selon le troisième et dernier scénario, les Etats-Unis, de par leur rôle primordial dans le financement des missions et Casques bleus onusiens, pourrait imposer l’un de leurs diplomates à la place de Köhler. Il ne s’agit pas seulement de pérenniser cette alternance Europe-USA au poste d’Envoyé spécial au Sahara, où ont déjà officié James Baker et Christopher Ross, mais peut-être de mettre en œuvre la nouvelle vision «boltonienne», qui exige de mettre fin rapidement au conflit du Sahara et qui a déjà réussi à réduire le mandat de la Minurso de 12 à 6 mois, renouvelable.
Une chose est sûre: le Maroc, l’Algérie et le Polisario ont exprimé leurs «profonds regrets» suite au départ de Köhler. Même s’il est facile de distinguer les sincères et moins sincères dans l’expression de ces regrets, il faut reconnaître que la résolution 2468 du Conseil de sécurité du 30 avril dernier, qui résume les efforts et recommandations de Horst Köhler, a constitué un coup dur pour l’Algérie et le Polisario.