Dans un article mis en ligne ce mardi matin, le site d’information basé à Bruxelles, EU Reporter, revient sur le rôle éminent que peut jouer le Maroc dans la redéfinition du partenariat liant l’Europe et l’Afrique, à la veille du sixième Sommet Union européenne‑Union africaine, qui se tiendra dans la capitale belge les 17 et 18 févriers 2022.
Pour mieux contextualiser les enjeux de cet important rendez-vous, le portail d'informations rappelle que «depuis le premier Sommet de 2000 au Caire, les relations entre les deux continents n'ont cessé d'évoluer. Alors que l'UE est passée de 15 à 28 – puis 27 – membres, l'Afrique a aussi profondément changé. Elle est devenue un carrefour d'opportunités, rendant nécessaire une refonte du partenariat entre les deux continents».
Cette refonte, poursuit-il, doit engendré un «changement de paradigme audacieux et ambitieux», avec pour objectif ultime de s'éloigner des schémas obsolètes et réducteurs «donneur-receveur» et «élève-prescripteur». Et d’ajouter: «parmi les pays les plus engagés dans cette ligne se trouve le Maroc. Tant par sa proximité avec l'UE, forgée au cours de plus de 50 ans de coopération et de dialogue, que par son engagement et son ancrage dans son continent africain, le Maroc est à la croisée de toutes les voies du partenariat UE-UA».
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EU Reporter estime ainsi que «la projection multiforme du Maroc sur le continent présente à juste titre un modèle innovant et pragmatique sur lequel le partenariat UE-UA pourrait utilement se construire».
Du pragmatisme et du concretLe sommet d'Abidjan de novembre 2017 avait déjà placé le partenariat UE-UA sur un pied d'égalité entre les partenaires, rappelle l’auteur de l’article. Le sommet a identifié des thèmes clés, tels que la jeunesse, l'investissement et la création d'emplois, et les a définis comme des priorités. Du côté européen, la stratégie pour l'Afrique, qui a été présentée par la Commission de l’UE le 9 mars 2020, et mise à jour entre-temps pour intégrer l'impact du Covid-19, identifie les grandes priorités que l'UE souhaite développer.
Du côté africain, l'approche de ce Sommet est pragmatique. Ainsi, «les pays africains, le Maroc en tête, soutiennent que le partenariat doit aller au-delà des réunions et des déclarations politiques pour s'impliquer davantage dans des actions concrètes et tangibles qui répondent aux attentes des citoyens», souligne EU Reporter.
«L'objectif est d'établir un espace euro-africain de paix, de stabilité et de prospérité partagée. C'est dans cet esprit que le Maroc, lors de la réunion ministérielle de Kigali d'octobre 2021, a soutenu la proposition rwandaise de créer un comité ministériel de suivi de la mise en œuvre des engagements», explique la même source.
Energie renouvelables: faire du Maroc un «hub électrique régional»L’auteur de l’article ne manque pas de faire un tour d’horizon des divers domaines de coopération entre l’Europe et l’Afrique jugés «indispensables», et pour lesquels le Maroc a un rôle clé à jouer, grâce à son expérience. Energies renouvelables, agriculture, industrie, migration… Les exemples sont nombreux.
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Pour ce qui est de la coopération dans les énergies renouvelables par exemple, et alors que 600 millions d’Africains vivent encore sans accès à l'électricité, EU Reporter estime qu'il est indispensable de s'appuyer sur des «modèles africains déjà éprouvés», comme c’est le cas pour le Maroc.
«Il y a plus de dix ans, le Maroc, sous l'impulsion du roi Mohammed VI, s'était fixé un objectif de 42% de la production d'électricité du pays à partir de sources renouvelables d'ici 2020, passant à 52% d'ici 2030. Le lancement d'un partenariat vert avec l’UE, le 28 juin 2021, est d'ailleurs la parfaite illustration de son engagement à cet égard», rappelle la publication bruxelloise.
Dans ce sens, l'Union européenne pourrait soutenir le renforcement de la capacité énergétique du Maroc en créant des pôles régionaux dans cette zone, pour faire du Maroc un «hub électrique régional» en Afrique, inspiré du réseau «Nord-Pool», situé au nord de l'Europe. L’UE pourrait ainsi combiner son expertise avec celle du Maroc dans le domaine des énergies renouvelables pour accélérer l'électrification du continent africain, notamment les zones rurales.
Agriculture, pêche durable, industrie: le Maroc, un cas d’écoleL’expérience du Maroc, en matière de développement de l'agriculture et de la pêche durable, apparaît également comme un modèle à suivre. En effet, l'article note que plusieurs pays africains ont déjà bénéficié de l'expertise du Maroc, notamment en matière d'appui aux secteurs inclus dans le cadre de la coopération avec l'UE. «Il existe un potentiel d'expertise à mettre au service du partenariat tripartite UE-Maroc-Afrique», la plateforme d'informations.
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Dans le même ordre d'idées, le Maroc a proposé une initiative pour l'Adaptation de l'agriculture africaine (AAA) à la COP22 à Marrakech, qui a été adoptée au niveau continental. Cette initiative a été annoncée par le roi Mohammed VI à l'ouverture du Sommet de l'action africaine en 2016, tenu à Marrakech en marge de la COP22: «Sensible à la vulnérabilité du secteur agricole, et conscient de son importance vitale, le Maroc se mobilise pour la réalisation de l'initiative Adaptation de l'agriculture africaine ou Triple A. Ce dispositif innovant favorise l'adoption et le financement de solutions, visant la productivité et la sécurité alimentaire», avait alors déclaré le Souverain.
Par ailleurs, ajoute l’auteur de l’article, les joint-ventures conclues par le Groupe OCP au Nigéria et en Ethiopie constituent un potentiel d'intégration verticale et horizontale dans ce secteur. De même, dans le cadre du Plan Maroc Vert, le Maroc a développé une logique d'agrégation et d'intégration agro-industrielle, qui a produit des résultats positifs et peut servir de modèle.
Le constat est le même pour ce qui est du domaine industriel, dans un contexte où la pandémie a révélé des faiblesses qui obligent l'Europe à repenser sa stratégie de production industrielle. «Le Maroc et l'UE ont la capacité de travailler main dans la main sur des questions stratégiques telles que la délocalisation industrielle et la coproduction», analyse la publication basée à Bruxelles.
L'Europe gagnerait à impliquer des partenaires africains, estime-t-elle, ajoutant que «là encore, l'expérience du Maroc avec de nombreux groupes européens dans l'industrie et les hautes technologies (automobile, aéronautique, câblage...), est un capital à faire fructifier».
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A ce titre, le lancement le 27 janvier dernier, par le roi Mohammed VI d’une nouvelle unité industrielle dénommée Sensyo Pharmatech, qui permettra le développement, la fabrication et la commercialisation de produits pharmaceutiques de grande nécessité, dont des vaccins, en collaboration avec le géant européen Recipharm, illustre parfaitement ce que le partenariat industriel entre l’Europe et l’Afrique peut produire de mieux. «Il s'agit ni plus ni moins de la naissance d'un hub africain d'innovation biopharmaceutique aux portes de l'Europe. Les bénéfices pour l'Afrique et l'Europe sont considérables, en termes de contribution à la santé et de souveraineté vaccinale», affirme EU Reporter.
Migrations: l’approche du Maroc«Sur la question des migrations, il est temps que les deux continents s'engagent dans un dialogue réaliste et concerté, non seulement pour surmonter les incompréhensions, mais aussi pour mieux construire ensemble un partenariat migratoire qui protège les migrants, dans l'intérêt de tous», écrit l’auteur de l’article, qui rappelle qu’en 2050, l'Afrique comptera 2,5 milliards d'habitants.
Sur cette question aussi, l’approche du Maroc fait figure de référence. EU Reporter ne manque pas à cet égard de citer la déclaration faite par le roi Mohammed VI, à l'occasion de l'adoption du Pacte de Marrakech: «la question migratoire n'est pas – et ne devrait pas devenir – une question sécuritaire. Répressive, elle n'est nullement dissuasive. Par un effet pervers, elle détourne les dynamiques migratoires, mais ne les arrête pas. La question de la sécurité ne peut faire l’impasse sur les droits des migrants: ils sont inaliénables. Un migrant n'est pas plus ou moins humain, d'un côté ou de l'autre d'une frontière».
«Cela nous rappelle qu'il n'y a pas d'efficacité sans un partage des responsabilités entre l'Europe et l'Afrique! Sans partage des charges, toutes les politiques étroites ou cloisonnées sont vouées à l'inefficacité», analyse EU Reporter.
Pour finir, la publication souligne que l'Union européenne a une «opportunité historique» de mettre en place un plan d'action ambitieux qui va au-delà des déclarations d'intention, en proposant à l'Afrique des projets et des initiatives structurés.
Et de conclure: «il est temps pour l'UE et l'Afrique de construire des complémentarités efficaces entre les initiatives promues par les Etats membres. Dans sa dimension régionale, le partenariat Maroc-UE est incontestablement un modèle; peut-être l'une des interactions euro-africaines les plus avancées et les plus réussies. L'expérience acquise par le Maroc pourrait servir de plate-forme modèle pour l'ensemble du partenariat Europe-Afrique. En l'érigeant en pôle régional, l'Union européenne pourrait développer une stratégie africaine plus en phase avec la réalité du terrain, en s'appuyant sur l'expérience reconnue des entreprises et banques marocaines en Afrique».