Au PJD, on voit rouge face à quiconque ose aborder la présumée implication de Abdelali Hamieddine, l'un des leaders de ce parti au gouvernement, dans le meurtre, en 1993 près du campus universitaire de Fès (Dhar Mehraz), de l’étudiant gauchiste Mohamed Benaissa Aït El Jid.
Et surtout quand on ose aller à l’encontre de la version du PJD, qui voit en la réouverture de ce dossier, et le nouveau procès en cours, un «complot politique» dirigé contre lui.
C’est ce qui vient de se passer avec la présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH).
Invitée, le week-end dernier, lors d’une émission de débat sur Medi1 TV, Amina Bouayach a estimé que du point de vue des droits humains, on ne saurait se prévaloir d’une prescription dans cette affaire.
«Il faut respecter la plainte de la famille de la victime et je pense que nous devons faire confiance à la justice», a expliqué celle qui a succédé à Driss Yazami à la tête de cette institution constitutionnelle.
«La justice pourra trancher en faveur de l’une ou de l’autre partie», a également affirmé Amina Bouayach qui cite, au sujet de la prescription, de nombreux exemples à l’international.
La présidente du CNDH a aussi appelé à laisser travailler la justice, «loin de toute tension politique».
Ceux qui connaissent et qui ont côtoyé Amina Bouayach, première femme à avoir présidé l’Organisation Marocaine des Droits Humains (OMDH), savent que lorsqu'elle prend la parole, elle le fait d’abord en tant que fervente défenseur des droits humains.
C’est d'ailleurs cette fibre qui a guidé ses propos sur le plateau de la chaîne tangéroise.
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Et cela n’a pas été du goût des islamistes qui semblent avoir érigé Abdelali Hamieddine en «ligne rouge».
Bouthaina Karouri, ou Madame Hamieddine et par ailleurs ex-conseillère de Mustapha Ramid au département de la Justice, s’est d'ailleurs fendue d’une tribune pour dénier à la présidente du CNDH le droit de s’exprimer sur l’affaire.
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D’autres dirigeants, ainsi que les fameuses «milices électroniques» du PJD, ont pris d’assaut les réseaux sociaux pour dire tout leur mécontentement devant les déclarations de Amina Bouayach.
Parions d'ailleurs que Abdelilah Benkirane ne tardera pas à faire de même, lui qui vient de se découvrir un faible pour les Live sur Facebook.
N'a-t-il pas d'ailleurs été le premier à accompagner Abdelali Hamieddine à Fès lors de la réouverture de son procès, pour une démonstration de force?
«Je ne veux pas faire de déclarations à part ce que j’ai dit sur Medi1 TV», nous a déclaré Amina Bouayach, qui semble avoir d’autres chats à fouetter.
L’affaire Aït El Jid a refait surface avec de nouvelles révélations de Khammar Haddioui, le principal témoin.
En plus de Abdelali Hamieddine, et dans un dossier à part, la justice poursuit quatre autres membres du PJD dont le procès, ouvert pour une audience ce 26 février, a été ajourné au 5 mars prochain.