Précédé d’une grande mise en scène et d’annonces sur tous ses réseaux sociaux, le site officiel du PJD a diffusé lundi soir une vidéo de quatorze minutes où Abdelilah Benkirane s’exprime sur les difficultés qu’il a rencontrées pour former un gouvernement.
L’allocution en question a été prononcée le 5 de ce mois devant les membres de la Commission nationale du parti islamiste, mais elle n’a été «libérée» qu’une dizaine de jours plus tard.
Interrogés par Le360 sur le timing de la diffusion de cette vidéo, des dirigeants du PJD se refusent à tout commentaire, arguant que seul Abdelilah Benkirane est habilité à se prononcer au nom du parti.
Dans cette vidéo, où le Chef de gouvernement désigné a attaqué à la fois le RNI et le PAM, Abdelilah Benkirane semble envoyer deux principaux messages. L’une des lectures possibles est qu’il adresse un message à l’opinion publique et, surtout, à ses bases pour les préparer à un éventuel échec des tractations qu’il mène depuis près d’un mois. Maist aussi, laisser entendre qu’on essaie de le déposséder de sa victoire par les urnes.
C’est dans ce sens qu’il a multiplié les références aux 37 sièges obtenus par le RNI dont les responsables agissent, selon lui, comme s’ils étaient aux commandes. Ou alors, quand il révèle que la présidence du Parlement allait être tranchée en l’absence du PJD et d’une majorité. Pour Benkirane, cela reviendrait à mépriser la volonté du peuple et les résultats des urnes.
Pour rappel, le RNI tient à la participation de l’USFP au moment où le PJD affirme que rien ne se fera sans l’Istiqlal. Benkirane n’a pas manqué de décocher des piques acerbes contre le PAM, qualifiant son score (102 sièges) de «marque honteuse» dans l’histoire du Maroc. En revancje, il a qualifié Hamid Chabat de «héros», expliquant qu’il n’a pas accepté de signer la mouture adressée par certains partis au souverain et de prendre part à l’élection du président de la Chambre des représentants avant la composition d’une majorité.
Le deuxième objectif de cette vidéo, diffusée la veille de la grand-messe du climat à Marrakech, consisterait à faire pression sur les autres protagonistes pour sortir du tunnel dans lequel s’enlisent les tractations depuis plusieurs semaines. Et c’est décidément la lecture la plus plausible et celle qui signifie que Benkirane n’arrive pas à constituer une majorité gouvernementale.
La diffusion de cette vidéo est le signe que la crise semble avoir touché son point culminant et que le Chef de gouvernement désigné ne négocie pas de façon à donner satisfaction aux autres partis. Fort de ses 125 sièges, il chercherait davantage à imposer plutôt qu’à négocier.
Espère-t-il après son cri de détresse porter certains partis à de meilleures dispositions? Prépare-t-il ses bases à faire des concessions aux autres partis?
En tout cas, tout laisse croire que la diffusion de cette vidéo est une manœuvre ou un poker menteur pour que, quelle que soit l’issue des tractations, Benkirane n’endosse pas l’échec de composer une coalition gouvernementale ou la responsabilité de jeter son tablier.