Les propos sont précis, le ton juste et la démarche inscrite dans une logique d’ensemble, où tous les moyens humains et logistiques sont déployés. C’est la conclusion à laquelle nous arrivons à l’issue de l’entretien qu’a accordé le Directeur général du Bureau central d'investigation judiciaire, Abdelhak Khiame, hier jeudi 27 juillet, à son bureau au siège du BCIJ. C'était dans le cadre de notre émission Grand Format, menée par Mohamed Chakir Alaoui. En voici, point par point, les enseignements.
Abu Bakr Al-Baghdadi est-il vraiment mort?L’actualité fait le tour de la planète, le chef de Daech aurait été tué. Mais qu’en est-il pour le BCIJ ? «Nous n’avons pas d’éléments qui puissent nous confirmer ou infirmer cette mort», avoue Khiame.
BCIJ, le bilanCréé en 2015, le BCIJ est aujourd’hui érigé en principale arme de lutte contre le terrorisme au Maroc. «Au jour d’aujourd’hui, nous avons démantelé quelque 46 cellules terroristes au Maroc, dont 41 étaient en lien direct avec Daech. En tout, et dans le cadre de ces opérations, 674 personnes ont été arrêtées», précise le patron du BCIJ.
Les Marocains de Daech«Le Maroc compte 1664 de ses ressortissants dans les rangs des différents groupes jihadistes à l’étranger dont, entre 950 et 980 chez Daech», précise Khiame, sur la foi de données actualisées. Sur la question, il se veut lucide: «Il serait illusoire de croire que la chute de Daech signifie la fin du terrorisme. C’est un problème d’idéologie. Nous en aurons fini avec le terrorisme quand nous aurons fini avec le radicalisme».
Les «revenants»Avec la chute des principaux fiefs de Daech en Syrie, en Irak et en Libye, la crainte d’un retour massif des combattants marocains ayant servi dans ses rangs devient réelle. «Entre 217 et 230 combattants sont revenus avant même les récentes défaites de Daech. Et depuis peu, 81 autres sont également rentrés», indique Khiame. Et de rassurer que, depuis 2015, le Maroc s’est doté d’une loi permettant de poursuivre et d’incarcérer toute personne ayant tenté ou a rejoint les rangs d’un groupe terroriste. Les peines sont lourdes et peuvent aller jusqu’à 20 ans de prison. «C’est ainsi que toutes les personnes qui rentrent des zones de tensions, et nous avons les moyens de les identifier, sont systématiquement arrêtées aux frontières, interrogées et présentées au parquet général qui les poursuit», précise-t-il.
Du redéploiement et du SahelReste pour ces groupes et individus des solutions de rechange: se déployer dans des zones fragiles d’un point de vue sécuritaire, comme le Sahel. «Le risque est grand», alerte le patron du BCIJ, qui déplore, à ce titre, l'absence de coopération de l'Algérie avec le Maroc en matière de lutte contre le terrorisme, dans une région menacée de déstabilisation.
«Si avec des pays comme l’Espagne, la coopération est d’un haut niveau et nous permet de mener des actions conjointes, le voisin de l’Est continue de refuser toute coopération. Pire, il héberge et finance un groupe que je considère comme terroriste. Je parle en tant que sécuritaire et je parle du Polisario. L’implication de ce groupe dans des opérations menées par AQMI est avérée», conclut-il.