Dans un entretien pour Le360, Abdelghani Youmni, conseiller des français de l’étranger (élu à Casablanca), décrypte les tenants et aboutissants de la mesure annoncée, mardi 28 septembre 2021, par Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement français, autorisant la réduction à hauteur de 50% du nombre de visas accordés par la France aux ressortissants marocains.
Youmni déplore une décision «très surprenante» qui porte atteinte à la mobilité et qui installe une confusion dans l’esprit des gens entre politique de circulation de personnes et politique migratoire.
«Sur les 3.301 ressortissants marocains sujets à expulsion du territoire français, on ne sait pas s’il s’agit de clandestins qui utilisaient des filières illégales ou de personnes parties avec un visa. Sachant qu’aujourd’hui, une personne qui demande un visa Schengen doit obligatoirement donner ses empreintes digitales et peut ainsi être identifiée facilement. Si on n’arrive pas à rapatrier ces gens, c’est parce qu’ils ne sont pas partis en France en demandant un visa», explique ce conseiller consulaire.
Quand bien même ces 3.301 personnes auraient un visa, elles ne représentent que 0,22% des visas accordés par la France aux Marocains durant tout le quinquennat Macron, a affirmé Abdelghani Youmni en rappelant la spectaculaire baisse du nombre de visas accordés aux Marocains ces deux dernières années, du fait de la pandémie (18.579 entre janvier et juillet 2021, contre 98.628 en 2020 et 346.032 en 2019).
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Interrogé sur l’impact de cette décision sur les Marocains demandeurs de visas Schengen auprès des consulats de France au Maroc, Abdelghani Youmni assure que les visas continueront à être délivrés normalement aux étudiants et aux personnes ayant des maladies chroniques. En revanche, des interrogations persistent sur les visas kafala et ceux destinés aux regroupements familiaux. «Nous allons travailler dessus, sachant que les autorités consulaires françaises au Maroc ont l’habitude de réagir favorablement aux cas sensibles», poursuit-il.
Citant le porte-parole du gouvernement français, Gabriel Attal, Abdelghani Youmni rappelle que la décision de réduire le nombre de visas accordés au Maroc va durer juste six mois, jusqu’à l’élection présidentielle. «On ne sait pas encore s’il y’aura un quota ou des critères à définir», tient-il à souligner.
Avec le rythme ralenti de délivrance de visas, du fait de la pandémie, il y a très peu de Marocains qui demandent des visas pour autre chose que le travail, a relevé le conseiller consulaire.
Et d’ajouter: «Le Maroc est un pays qui a vu émerger une classe moyenne qui voyage beaucoup à travers des visas touristiques. Avant le Covid, chaque année, plus de 180.000 Marocains partaient en vacances en Espagne. Les partis extrémistes français doivent comprendre que les choses ont changé et que les pays du Sud sont en train d’avancer».
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Interrogé sur le fait de savoir si cette mesure a été décrétée à des fin électoralistes, Youmni n’exclut pas cette option et voit dans cette décision une sorte de rançon dans un contexte marqué par la «zemmourisation» du débat public et de la campagne électorale en France. «Ça a commencé avec les visas et tout porte à croire que ça ira crescendo. Ça peut aller jusqu’à l’arrêt du regroupement familial, voire la déchéance de nationalité», renchérit le conseiller consulaire.
Selon Abdelghani Youmni, le débat électoral en France doit se recentrer sur des questions fondamentales que sont l’emploi, la solidarité, la fracture territoriale, la digitalisation de l’économie, l’innovation et le rapport avec la Chine et les Etats-Unis.