Cette déclaration du ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, devant les parlementaires, il y a quelques semaines, fera date. En tant que ministre, mais avant tout en tant qu’avocat de carrière, Ouahbi a soutenu que la demande d’un acte de mariage au couple par les hôteliers est illégal.
«Depuis 20 ans que je cherche un fondement juridique à cette pratique, je n’en trouve pas», a-t-il affirmé. En conséquence, «celui qui demande ce document, non seulement porte atteinte aux libertés individuelles des citoyens, mais il risque aussi des poursuites judiciaires», précise le ministre dont les propos ont été rappelés par le quotidien Assabah qui revient sur ce sujet dans son édition du week-end des 8 et 9 juin.
Le ministre fait prévaloir les libertés publiques. Les groupes parlementaires de la majorité l’ont soutenu. Ailleurs les réactions divergent. Les défenseurs des libertés individuelles applaudissent, les islamistes et autres conservateurs enragent, accusant le ministre de vouloir encourager la débauche. Entre les deux, certains estiment que si les hôtels se permettent de servir de l’alcool aux citoyens musulmans, pourquoi exiger un acte de mariage. La situation tourne parfois au ridicule, notamment quand un couple se présente avec ses enfants.
Les hôteliers se montrent méfiants et exigent un texte juridique qui clarifie les choses. Surtout après la médiatisation de l’arrestation d’une gérante d’hôtel à Sidi Kacem pour aménagement d’un lieu de débauche. Une source proche du ministre, citée par le quotidien, affirme d’ailleurs que les propos d’Abdellatif Ouhabi n’ont aucun lien avec cet incident.
Certes, souligne le quotidien, selon l’article 36 de la loi relative aux hôtels et autres établissements d’hébergement touristique, ces derniers sont tenus de déclarer quotidiennement auprès de l’administration, par procédé électronique dénommé télédéclaration, les données relatives à leur clientèle de séjour ou de passage. Mais cela n’a rien à voir avec l’obligation de la présenter l’acte de mariage.
Cependant, les hôteliers n’en continuent pas moins de se montrer méfiants. C’est que d’un autre côté, le risque est grand. Le code pénal punit en effet de prison ferme et d’une amende conséquente, pouvant atteindre un million de dirhams, toute personne aidant à la prostitution et à la débauche.
Aussi, les hôteliers rejettent la balle dans le camp des autorités sécuritaires, la police et la gendarmerie. Les groupes parlementaires de la majorité ont bien l’intention de convoquer le ministre de la Justice pour une session de débat au sein de la commission de la justice.