Le reproche fait à Charlie Hebdo, accusé par certains d’être un journal islamophobe, est-il fondé? La journal Le Monde a ainsi pris l’initiative intéressante de se pencher sur les 523 premières de couverture du journal satirique, avant l’attaque sanglante dont il a été victime le 7 janvier 2015, attaque qui a fait 11 victimes, dont les prestigieux caricaturistes de la rédaction: «De qui se moquait le journal satirique Charlie Hebdo, avant que deux terroristes islamistes assassinent cinq caricaturistes et six autres personnes présentes à la conférence de rédaction?» Telle est la question que se pose le quotidien français. Question déjà posée précédemment dans une tribune du Monde du 15 janvier 2015 qui avait interpellé des chercheurs autour de la problématique de savoir si, oui ou non, Charlie Hebdo avait particulièrement tendance à s’en prendre à la religion musulmane et ses symboles. Et le journal de revenir aujourd’hui sur «la vitrine» du journal, soit les caricatures illustrant sa Une, «le faible nombre d’abonnés que comptait Charlie Hebdo avant les assassinats (laissant) supposer que c’est sur la base de ses « unes » que le journal a été accusé d’islamophobie.»
Relevant que, sur les 523 Une en question, 336 se rapportent à la politique, 85 aux sujets économiques et sociaux, 42 aux «people», et seulement 38, soit à peine 7%, à la religion, Le Monde révèle que, concernant cette dernière, Charlie Hebdo taquinait avant tout la religion catholique. Ainsi, 21 pages de couverture sur les 38 dédiées à la question religieuses lui sont consacrées, tandis que l’islam ne fait l’objet que de 7 caricatures. «Les juifs, quant à eux, sont toujours raillés aux côtés des membres d’au moins une autre religion, comme l’islam dans le n°1057», ajoute le journal qui en conclut que, loin d’être «obsédé par l’islam», Charlie Hebdo prenait surtout pour cibles les hommes politiques, en l’occurrence ceux de droite et, surtout, d’extrême droite. Un journal «irrévérencieux», certes, mais «indéniablement antiraciste», affirme le monde à l’issue de cette analyse. Et de se demander pourquoi, lorsqu’il tient si peu de place, le volet «islam» a pris tant d’ampleur. Le fait est que le terrorisme se joue de la raison et guette le prétexte pour enflammer les esprits. Reste à savoir comment endiguer l’emprise qu’il semble avoir, une emprise qui défie les frontières au point de mobiliser, à Paris, des jeunes qui en arrivent à se réclamer de Daech et à créer un bain de sang. La solution? Elle est à trouver auprès des intellectuels et des chercheurs, car «le manque de connaissances sérieuses «laisse le champ libre aux interprétations et aux solutions simplistes»», affirme Le Monde, citant le sociologue Olivier Galland.
