La décharge contrôlée de Médiouna est tenue pour responsable de la propagation d’une odeur nauséabonde qui envahit plusieurs quartiers de Casablanca. Une odeur qui se dégage, d’après une annonce de la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, des bassins de lixiviat.
«Ces odeurs seraient le résultat d’une fuite de lixiviat, résultant de la fermentation des déchets solides enfouis», avait-elle déclaré dans sa réponse à des conseillers lors de la présentation du budget de son département devant la Commission des secteurs productifs de la Deuxième chambre du Parlement.
Interrogé par Le360, Youssef Naimi, enseignant-chercheur et chef du département de chimie de la Faculté des sciences Ben Msik à Casablanca, explique l’importance d’une réorganisation de cette décharge permettant à la fois de valoriser les déchets, de traiter le lixiviat et de générer de l’électricité.
En ce qui concerne la valorisation des déchets, le chimiste partage d’emblée son constat: «La valorisation des déchets ménagers et industriels commence par un tri au préalable, notamment dans les ménages. Cela ne se fait pas encore au Maroc».
Faute d’une implication des citoyens dans ce processus de valorisation des déchets, «le tri peut se faire au niveau des décharges, toutefois cela se fait d’une manière informelle et traditionnelle», regrette cet interlocuteur.
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A quoi le tri des déchets au niveau des ménages et des décharges peut-il concrètement mener? «On peut obtenir du biogaz à partir des matières organiques et le valoriser pour la production d’électricité», répond le chimiste.
En d’autres termes, en séparant les déchets solides et industriels des déchets organiques fermentescibles (restes de repas, épluchures, fruits avariés, produits périmés...) et des déchets de restauration collective, une revalorisation de ces derniers et la production du biogaz sont possibles. Cette procédure n’entraîne que très peu d’odeurs, mais coûte toutefois «cher». «C’est un investissement coûteux, mais très fructueux à la fin», note Youssef Naimi, pour qui des expériences ont vu le jour au Maroc et peuvent constituer un modèle à suivre pour les responsables de la décharge de Médiouna.
«La décharge de Fès produit de l’électricité à partir du biogaz, permettant l’électrification du monde rural. On a pratiquement toute une route éclairée grâce à ce biogaz», fait savoir le chimiste.
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S’agissant du lixiviat, il convient de disposer, tout près du bassin de collecte de cet effluent, d’une unité de traitement de type «réacteur biologique» permettant de dégrader les pollutions organiques et azotées et de dégager certains éléments minéraux, notamment les substances métalliques, par nitrification via les bactéries aérobies, puis dénitrification via les bactéries dénitrifiantes, explique le Professeur Youssef Naimi pour Le360.
«On peut réinjecter le lixiviat traité pour une deuxième utilisation dans la décharge», poursuit cet enseignant-chercheur. Ce procédé permet une amélioration de la biodégradation des déchets par l’augmentation de l’humidité et la redistribution des micro-organismes, insiste le scientifique.