Devant la pression de son employeur, un banquier se suicide

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Un cadre d'une banque de Casablanca s'est donné la mort la semaine dernière. Selon des sources internes, il aurait subi de lourdes pressions de la part de la direction des ressources humaines pour démissionner.

Le 29/06/2015 à 15h24

Jeudi 25 juin, le soir. Un homme rentre du boulot. Habituée à sa mine fatiguée, sa femme ne prête pas attention lorsqu’il change de pièce et s’enferme dans une chambre, pensant qu’il allait, comme à l’accoutumée, accomplir sa prière. La prière a duré longtemps. Très longtemps. L’épouse toque, une fois, deux fois, personne ne répond. L’inquiétude commence à s’installer. Prise de court, elle appelle au secours des voisins qui défoncent la porte. A l’intérieur, le corps de l’homme pendu.

Lui, c’était Hatim, 39 ans. Père de deux enfants et cadre au siège d'une banque de Casablanca depuis dix ans. Cela faisait un moment que son boulot lui pèse. Diplômé de l’ISCAE, enseignant à l’ENCG, il avait occupé le poste de relationship manager à la banque et en était heureux. Les jours défilaient et les choses commençaient à se compliquer. Ses supérieurs lui changent de poste et le mettent au factoring. "C’était un boulot minable pour lui", nous confie l'un de ses collègues. 

"Je risque de faire quelque chose de très mal"

Les nombreuses tentatives de communiquer avec la direction des ressources humaines ont été vaines."Il a essayé plusieurs fois d’engager le dialogue avec ses supérieurs, de comprendre pourquoi on le traitait ainsi, pourquoi on lui a filé ce poste dans le factoring, qu’il était plus compétent que la majorité de ses collègues. On l’a traité comme un vaurien. Voilà le résultat». Sa désaffection du poste de relationship manager l’aurait beaucoup affecté. Une "bourde" commise par la victime dans le passé en serait la cause: "A un moment, il a autorisé la faisabilité de certains projets avec des investisseurs, et cela n’a pas été accepté par la direction. On voulait lui faire payer cette gaffe toute sa vie. C’est minable", s’indigne la même source.

Le soir du jeudi 25 juin, quelques heures avant le drame, Hatim aurait demandé audience avec le directeur des ressources humaines de sa banque. "Elle lui a été accordée. Je ne sais pas ce qu'ils se sont dits, mais visiblement ce n'était pas quelque chose de positif pour Hatim", nous confie-t-il. "Une fois, je me souviens, dans un excès de désespoir, il a dit à la DRH qu'il risque de faire quelque chose de très mal.", poursuit-il. 

Personne n’ose parler

Ses collègues, sa famille et ses amis sont sous le choc. "On ne s’attendait pas à cela de sa part", poursuit la même source. "C’était quelqu’un de sociable, ambitieux, drôle, pieux et, surtout, très compétent",selon son ami et collègue. Même après le drame, les employés ont davantage sombré dans le mutisme. "Tout le monde dans la boîte connaissait les problèmes de Hatim. Même après sa mort, personne n’ose ouvrir la bouche. Même le syndicat qui est censé défendre les employés est complice de leur silence. C’est rageant !", s’insurge-t-il. Par ailleurs, le défunt aurait laissé une lettre à son épouse, où il aurait exprimé son désarroi et mentionné quelques noms de certains employés à la direction des ressources humaines de la banque, responsables, selon lui, de sa descente aux enfers. 

Par Rania Laabid
Le 29/06/2015 à 15h24