Le fleuron de la communication du prince Moulay Hicham a une part occulte qui risque de surprendre par son opacité ceux qui croyaient aux discours du chantre de la transparence et de la démocratie. Le registre de commerce de la fondation Moulay Hicham est un document qui suscite plus d’une interrogation et pousse légitimement à se poser des questions sur les véritables visées de la création d’une structure dont la vocation autoproclamée est de favoriser la recherche en sciences sociales sur le Maghreb et le Moyen-Orient. Le registre de commerce de cette fondation est enregistré dans la principauté du Liechtenstein. Elle portait d’abord le nom de Fondation pour la recherche et le développement au Maghreb et au Moyen-Orient avant que le prince ne lui reconnaisse comme autorité éponyme sa propre personne.
Le registre de commerce nous apprend que le conseil de la fondation Moulay Hicham se constitue de quatre membres, dont le prince qui en est le président. Les trois autres membres sont de parfaits inconnus au monde de la recherche contrairement à ce qu’aurait dû laisser supposer toute fondation dédiée aux sciences sociales. Mieux que cela : les trois autres membres ne sont même pas des personnes physiques, mais des sociétés. La première, Lic. iur. Harry Gstöhl, est domiciliée à Vaduz au Liechtenstein. Nous n’avons pas réussi à en déterminer l’activité. La deuxième société, qui occupe la fonction de trésorier de la fondation, a pour nom Peter Clarence. Etablie à Genève en Suisse, cette société est spécialisée dans le placement de capitaux. Le troisième membre du conseil de la fondation Moulay Hicham est une société fiduciaire, portant le nom de Mareco Treuhand-Anstalt, et domiciliée à Triesenberg au Liechtenstein.
Montage complexe
Quand on visite le site de la fondation Moulay Hicham, on ne trouve plus trace de ces sociétés aux noms gutturaux. Un comité scientifique est constitué de sept membres dont la plupart sont connus par leurs publications dans les sciences humaines : Khadija Mohsen-Finan, Bernard Haykel, Richard Falk, Henry Laurens, Farhad Khosrokhavar, Sean Yom et Olivier Roy. On se demande comment vont réagir ces sept chercheurs du comité scientifique quand ils apprendront que les illustres membres du conseil de la fondation Moulay Hicham sont des sociétés spécialisées dans la fiscalité et la finance.
Et nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec la fondation Moulay Hicham. Car si la fondation est domiciliée au Lichtenstein, ses comptes se trouvent à Genève à la banque Crédit Suisse sise 17, rue de Lausanne. On peut se demander pourquoi les actifs de cette fondation sont gardés dans une banque à Genève alors que le gros de ses activités sont concentrées aux Etats-Unis. Est-ce que cette fondation est déclarée auprès de l’Internal Revenue Service américain (IRS), l’organisme en charge de la collecte des taxes aux USA ? En tout cas, le montage complexe d’une fondation de droit liechtensteinois, domicilié à Vaduz au Liechtenstein, dont le compte bancaire se trouve à Genève et le plus clair des activités aux USA pousse à se poser plus d’une question. La complexité de ce montage est absolument inhabituelle de la part d’une fondation qui se dit dédiée à la recherche sur les sciences sociales au Maghreb et au Moyen-Orient. Cette opacité entache les principes de transparence dont se proclame le prince et jette le doute sur le rôle de la victime qu’il s’apprête à jouer.