La dernière apparition en public de Abdellatif Merdas remonte au 6 mars à Benslimane. Ce jour-là, le Conseil de la région de Casablanca-Settat se réunissait et il avait pris la parole pour revendiquer la neuvième présidence au nom de l’UC, Mohamed Joudar ayant été obligé de céder le poste.
Ce point a été retiré de l’ordre du jour pour être programmé ultérieurement. Et ce mercredi, ce sont les membres du Conseil régional qui se sont rendus chez Merdas au quartier Californie pour présenter leurs condoléances à sa petite famille.
Sous l’aile d'Amaoui et d'AmhalEn 1963, Abdellatif Merdas voit le jour dans une famille modeste du quartier Al Kasbah à Beni Ahmed, fief de la tribu Mzab. Son père est tailleur traditionnel et travaille durement pour subvenir aux besoins de sa famille.
Après un cursus plutôt chaotique, Abdellatif Merdas obtient son bac. Comme plusieurs jeunes de Ben Ahmed, il milite au sein de la Chabiba de l’USFP et, plus précisément, dans le clan de Noubir Amaoui, l’éternel SG de la CDT.
Comme d’autres politiques de la région (Joudar, entre autres), il migre vers l’Union Constitutionnelle et trouve un nouveau parrain en la personne du richissime homme d’affaires, Amhal.
Entre-temps, il fréquente une école de langues à Marrakech, sans grand succès. «Ce n’était pas une sommité intellectuelle, mais il a appris l’art des magouilles et des coulisses», se souvient l’un de ses vieux amis de jeunesse.
Abdellatif Merdas a des ambitions politiques, mais ne peut rien entreprendre du moment que Lhaj Amhal était aux commandes.
Son mentor, pour qui il travaillait d’ailleurs comme homme à tout faire, se faisant vieux, il se lance dans l’arène politique au nom de l’UC.
Le petit seigneur de Ben AhmedAu début des années 2000, la chance lui sourit. Il est élu député à Ben Ahmed et, une année plus tard, devient maire de cette même ville.
Il arrive même à se faire élire au Parlement en 2007, mais les magistrats du Conseil constitutionnel sont d’un avis contraire.
Il retente sa chance en 2011 et retrouve le confort des sièges de l’Hémicycle.
Le 7 octobre 2016, il remporte un nouveau mandat après s'être déjà assuré un siège au Conseil de la région Casablanca-Settat.
Père de trois enfants (Meryem, Maroua et Yassine), il s’impose dans la nouvelle configuration de la Direction UC.
Le parti du Cheval compte sur lui pour éviter que la région de Ben Ahmed ne lui échappe. Il s’acquitte de sa mission jusqu’au drame de la soirée du mardi 7 mars.
Craint et haï à Ben Ahmed, des interrogations ont toujours été soulevées concernant sa fortune. On parle même de liens peu orthodoxes avec certains milieux mafieux.
«C’est faux, répond l'un de ses amis, Abdellatif Merdas était un as des manigances politiques en coulisses pour remporter un scrutin ou faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre, mais il s’est toujours gardé de se mêler d’activités hors la loi. C’était quelque part un trouillard».
Au moment où nous mettions en ligne, les services de police, dans des délais records, sont parvenus à mettre la main sur un premier suspect. La suite de l’enquête ne tardera pas à dévoiler les dessous de cet assassinat, fait inédit au Maroc.
«Les Mzab ont un caractère belliqueux et peuvent en découdre de manière radicale pour un oui ou pour un non. Et il n’est pas difficile de se procurer un fusil à Ben Ahmed puisque chaque famille en possède», commente une vieille connaissance de Abdellatif Merdas.