Spoliation foncière: l’affaire «Hay Cuba» devant la justice

Le tribunal de Casablanca.. DR

Revue de presseL’un des plus anciens dossiers de spoliation immobilière de Casablanca refait surface. Des avocats, des notaires, des intermédiaires et plusieurs héritiers d’un riche propriétaire d’origine cubaine se retrouvent aujourd’hui face à la justice. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Assabah.

Le 14/11/2025 à 22h03

L’enquête ouverte autour des biens du “Hay Cuba” n’a cessé de s’épaissir au fil des années. Ce patrimoine, jadis propriété d’un riche homme d’origine cubaine installé au Maroc depuis 1927, est aujourd’hui au cœur d’un feuilleton judiciaire où se croisent héritières spoliées, acteurs influents du monde juridique et signatures suspectes, indique le quotidien Assabah dans son édition du weekend des 15 et 16 novembre.

Derrière les procédures s’étire une histoire qui remonte aux années quarante, marquée par des jugements validés en 1982 puis confirmés en 1989, avant d’être engloutie sous des décennies de manipulations foncières savamment orchestrées.

À la mort du propriétaire cubain en 1982, ses deux petites-filles engagent une série de démarches pour sécuriser le patrimoine familial. Déjà en 1955, elles avaient sollicité des mesures conservatoires concernant les biens hérités. Leur action débouche sur une décision judiciaire en leur faveur rendue par le tribunal civil de Casablanca, puis confirmée en appel quelques années plus tard. À leurs côtés, un avocat connu prend en charge leur dossier. Il deviendra pourtant, plus tard, l’un des principaux accusés, peut-on lire.

Les liens familiaux et successoraux se compliquent davantage lorsqu’émerge la figure d’un Français présenté comme gestionnaire désigné des biens par le grand-père défunt. Son décès en 1997 laisse un testament confié à son fils, chargé d’exécuter ses volontés. Selon les héritières, un accord avait été conclu afin de garantir leur avenir une fois adultes.

Mais les révélations prennent un tournant dramatique en 2005, lorsque les petites-filles apprennent qu’une autorisation aurait été délivrée à l’avocat français pour céder 50% du patrimoine en échange de 35 millions de dirhams. Une décision dont elles assurent n’avoir jamais été informées, relève Assabah.

Les investigations montrent aussi que ce patrimoine considérable, estimé à plus de 50 milliards, aurait été au centre de multiples opérations menées pendant plusieurs décennies. Signature de contrats contestés, ventes accomplies via des notaires, mandats transférés d’une administration à une autre, sans oublier des transactions conclues pour le compte d’intermédiaires. L’ensemble dessine un système structuré où la valeur stratégique des terrains a suscité de nombreuses convoitises.

La municipalité de Rabat apparaît à son tour dans le dossier après avoir reçu, selon les enquêteurs, une cession effectuée par le Français. La municipalité aurait ensuite délivré une procuration au fils de l’avocat lui permettant d’opérer à son tour. Ce dernier est soupçonné d’avoir vendu un bien d’un milliard signé à Mohammédia au profit d’un investisseur casablancais. Selon l’enquête, la somme aurait été remise au père, lui aussi mis en cause.

La situation se complexifie encore avec la présence d’une Française, propriétaire d’une société immobilière à Marrakech, faisant l’objet d’un mandat de recherche pour émission de chèques sans provision. L’avocat aurait réglé ses dettes, en contrepartie d’avantages liés à des biens du patrimoine spolié. Les héritières affirment que ces transactions servaient à couvrir des « commissions importantes » versées dans l’ombre, parfois régularisées par des décisions judiciaires, fait-on savoir.

Depuis 2018, le dossier est entre les mains du juge d’instruction qui poursuit les auditions. Plusieurs prévenus multiplient les absences aux sessions d’écoute détaillée, retardant l’avancée des investigations. Les héritières, elles, produisent des documents originaux datant des décennies passées pour démontrer leur filiation et combattre les actes qu’elles jugent contrefaits.

Par La Rédaction
Le 14/11/2025 à 22h03