C’est un visiteur de la place Jamaa El Fna qui l’aurait remarqué: sur la bâche en plastique d’un des vendeurs de sandwichs du site touristique marrakchi le plus célèbre du royaume, le drapeau du polisario est là… noyé au milieu des drapeaux de différents pays. En patriote averti de la gravité de la symbolique, il alerte le commissariat le plus proche. Les forces de l’ordre rappliquent et ne font pas dans le détail, bien évidemment: le gérant du bouiboui est interpellé, le fabricant de la bâche en question, installé à l’autre bout de la ville, aussi. Une enquête est ouverte.
Ce sont les quotidiens Al Akhbar et Al Ahdath qui relatent cette affaire dans leurs éditions du 12 décembre. Ils révèlent d’ailleurs les premiers éléments de l’enquête. La gargote sur roues en question appartient à un élu communal. Son attribution est d’ailleurs controversée, à en croire nos confrères. Cette «concession» délivrée du temps de l’ancien maire Omar Jazouli (aujourd’hui sous le coup d’une instruction judiciaire) aurait été contestée par l’association des commerçants de Jamaa El Fna qui y voyaient un abus de pouvoir: le bénéficiaire n’appartient pas à la corporation, il est plutôt fonctionnaire du département de l’Enseignement.
Le gérant du commerce arrêté n’est autre que le neveu de cet élu communal qui aurait bénéficié -ou aurait été récompensé par l’ancien maire- de ce commerce. Instinctivement, il a révélé où la bâche avait été fabriquée, conduisant à l’arrestation du propriétaire de l’imprimerie responsable de reproduire ce motif constitué de drapeaux du monde, y compris celui de la supposée république sahraouie. Les interrogatoires des deux prévenus détermineront si l’un d’entre eux a agi en connaissance de cause. Auquel cas, il risque gros pour avoir exhibé un symbole hostile au triptyque du royaume. On ne badine pas avec l’intégrité territoriale.