Abderrazak Soumah a été l’un des émirs fondateurs du mouvement terroriste "Harakat Al Moujahidine bi Lmaghrib" ("Le mouvement des moudjahidines au Maroc"). Il vient de faire une nouvelle sortie médiatique pour révéler le dessous des allégations d'actes de torture qu’aurait subis le dénommé Ali Aarrass, lors de sa détention, au Maroc, dans les années 2000.
"Les salafistes affirment qu’il est licite de recourir au mensonge contre l’Etat considérant que cela pourrait lui créer beaucoup de problèmes", affirme le djihadiste repenti. Abderrazak Soumah fait allusion à ce qu’on appelle, dans les milieux terroristes, la "Taqiya", soit le recours au mensonge et à la dissimulation pour tromper l’ennemi. Et, en la matière, Ali Aarrass, est un as, très doué, à l’instar de ceux qui n’ont pas cessé de le défendre.
Arrêté à Melilla, le 1er avril 2008, en vertu d’un avis de recherche datant de 2003 et transmis à Interpol, Ali Aarrass avait été remis aux autorités marocaines en décembre 2010. Il avait ensuite été condamné, en 2011, à 15 ans de prison. Une peine ramenée à 12 ans, une année plus tard par la Cour de cassation.
"Ali Aarrass a rejoint les rangs de Harakat Al Moujahidine bi Lmaghrib en 1981. Je l’ai rencontré à maintes reprises en France, en Belgique et au Maroc. Il maîtrise à merveille la langue arabe et s’exprime couramment en darija", révèle Abderrazak Soumah. Et d’ajouter, c’est en arabe ou en darija que nous échangions entre nous, apportant de la sorte un démenti à Ali Aarrass, qui prétend s’exprimer uniquement en amazigh (tarifite) et en français.
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Selon ce témoignage de Abderrazak Soumah, diffusé sur les réseaux sociaux, "Aarrass était le responsable de la logistique du mouvement (Al Moujahidine bi Lmaghrib, Ndlr) et il avait ouvert une librairie en Belgique pour faciliter les transferts de fonds".
Des euros et des kalachnikovs Ali Aarrass était plus qu’un responsable de la logistique de ce mouvement démantelé par les autorités marocaines début des années 2000. Ancien soldat de l’armée belge, il a mis son expérience militaire au service des funestes plans du mouvement. C’était l’artificier du groupe, celui qui fournissait les armes à feu et formait à leur maniement.
Pour ce faire, il a d’abord assuré l’acheminement d’armes au Maroc. "Aarrass est celui qui a introduit les premières armes à feu découvertes par les autorités, en 2003, à Berkane. Parmi ces armes, il y avait deux kalachnikovs et deux pistolets ainsi que des munitions. C’est également lui qui a introduit deux pistolets automatiques saisis à Tanger. Et c’est lui qui a fourni les armes qui ont été derrière notre arrestation dans l’arrière-pays de Tiflet", témoigne Abderrazak Soumah.
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Et d’ajouter que Aarrass avait relayé le financement du mouvement après le décès d’un djihadiste dénommé Nouâmani. "Notre mouvement armé visait à semer la chaos avec une confrontation avec le régime par le biais d’opérations sanguinaires avec des explosifs, des assassinats et des vols. Grâce à Dieu, nous n’avons pas réussi", ajoute le djihadiste repenti.
"J’ai été surpris, en compagnie d’une vingtaine de détenus salafistes, par le traitement respectable qui nous a été réservé (par les services de sécurité, ndlr) et ce contrairement à ce qu’on racontait dans le milieu. Il faut arrêter de mentir car tout a été documenté par les autorités compétentes", commente Abderrazak Soumah.
Et d’évoquer sa première expérience: "quand j’ai été arrêté en 2012, je m’attendais à être torturé de la pire des façons. C’est ce à quoi je m’attendais avec mes compagnons, d’autant plus que j’étais le dernier survivant parmi les fondateurs du mouvement à être arrêté. Néanmoins, j’ai été surpris par le comportement humain des autorités à mon égard ainsi qu’à l’égard des 20 autres membres qui faisaient partie de mon groupe. Nous avions pourtant des armes pour perpétrer des massacres et non pour faire un couscous!".
Le djihadisme jusqu’au boutAbderrazak Soumah revient également sur la vidéo enregistrée en 2012 par Aarrass au pénitencier de Salé 2, et dans laquelle il exhibait des traces de sévices corporels. Et de s’interroger: "comment se fait-il que Aarrass, qui a été arrêté en 2010, garde des hématomes pendant deux ans?". Et d’ajouter: "nous autres, salafistes djihadistes, sommes connus pour recourir au mensonge contre nos ennemis, contre l’Etat. On enduisait des parties du corps par le rhassoul ou le henné et on se filmait ensuite, suggérant ainsi des marques de tortures", révèle Abderrazak Soumah.
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Soumah, qui révèle dans ce témoignage de premier plan, les modes opératoires utilisés par djihadistes, y compris après leur arrestation, pour poursuivre leur combat contre l’ennemi (l’Etat), appelle à faire preuve de "faire-play". "Nous avons joué et perdu". Selon toute vraisemblance, Ali Aarrass, lui, ne l’entend pas de cette oreille.
Libre depuis début avril 2020, après avoir purgé sa peine, Ali Aarrass a regagné la Belgique trois mois plus tard et a commencé sa campagne de diffamation contre le Maroc et ses institutions. Une manière de poursuivre jusqu’au bout la partie, commencée avant son arrestation, contre l'ennemi qu'il s'est désigné: l’Etat marocain.