Sur la forme, toute personne sensée ne peut que saluer la dernière sortie du PPS, un parti politique des plus respectables, légitime et aux tracés bien clairs. Par son annonce de retrait du gouvernement, cette formation, fortement ancrée bien que peu populaire, veut incarner ce «nouveau souffle» démocratique que ses ténors ne cessent de réclamer pour la vie politique marocaine.
Sur le fond, cependant, il y a un «mais». Le PPS justifie son retrait par le peu de conviction qu’il a dans l’actuel gouvernement. Or, en parlant de convictions, on ne peut être bercé par un idéal socialiste, et croire que le salut pourrait émaner du parti dominant, aux croyances foncièrement, définitivement et durablement, extrémistes.
Le PPS se dit «fatigué» d’une gestion gouvernementale manquant de tout esprit politique, résolument tournée vers le seul but de récolter des voix en vue des prochaines élections et minée par tant d’antagonismes. Mais que peut-on espérer d’une majorité gouvernementale où le chaud bouillant de certains intégrismes le dispute au froid glaçant d’autres, quant à eux calculateurs, et dont le maintien dans une certaine idée du «pouvoir» est, pour eux, une fin en soi?
Cela va pratiquement faire dix ans que cette situation dure (et perdure). C’est à s’y perdre, car le PPS en a été un acteur des plus actifs. Son nécessaire mea culpa attendra donc.
Comment le PPS a-t-il pu valider et soutenir, alors, un Abdelilah Benkirane, harangueur professionnel de foules, aux idées dogmatiques à souhait et populiste à en pleurer (parfois même, au sens propre)? Comment a-t-il pu croire que cet homme pouvait représenter ne serait-ce qu’un once d’ouverture et de progrès? Comment avoir pu croire que son successeur, Saâd Eddine El Othmani, aurait pu être ce charismatique fédérateur d’hommes capable d’unir, au-delà des idéologies, toutes les forces vives de la nation pour nous sortir d’un naufrage socio-économique annoncé? Alors même que l’actuel chef du gouvernement clive, au sein même de son propre parti, et se contente, à défaut de pouvoir les gérer, de maintenir sous le coude projets de développement, aspirations populaires, déceptions et contestations, en attendant de les refourguer, telles des patates chaudes, à celui qui lui succédera…
Le PPS, parti honnête, aux militants qui sont, aussi, un véritable réservoir d’idées et de compétences, a pourtant, dix ans durant, joué le jeu. Il en est sorti comme étant le perdant. En misant sa participation à l’actuelle coalition qui forme la majorité au gouvernement, il s’est retrouvé aux antipodes de ses valeurs, et n’a fait que renforcer une formation qui, elle, n’a eu de cesse de l’affaiblir. Le PPS croyait bien faire, pensant incarner le beau rôle, celui de facteur d’équilibre et de voix de la raison. Ce jeu aura duré dix ans et cela compte dans un pays qui n’a plus le temps de jouer à d’inutiles et stériles prolongations.
Bien que maladroit et tardif, ce retrait du gouvernement, décidé par le bureau politique du parti, est synonyme d’un certain éveil. L’espoir est en effet permis, car si cela peut faire tache d’huile et se traduire, par la suite, par une révision générale des idées de nos dirigeants politiques, dont l’aboutissement serait des partis polarisés, aux idées claires, aux programmes bien définis, avec de vrais projets de société à même de se poser en sérieux challengers, ce serait, là et seulement là, un beau rectificatif à l’actuelle ambiance délétère.
Mais en attendant, une question s’impose: le PPS aurait-il eu ce courage de sortir du gouvernement s’il avait l’assurance de pouvoir garder les portefeuilles de l’Habitat et de la Santé dans la prochaine équipe El Othmani? Le doute est permis. Et c’est là où l’espoir nourri prend un sale coup.