En 2016, nous parlons encore de Maakoul. Une amie européenne m’a demandé ce que pouvait bien signifier ce mot étrange. J’ai hésité avant de répondre: «C’est une blague!». J’adore le Maakoul. C’est une expression qui a bercé mon enfance. On me disait: «Sois Maakoul, toujours Maakoul, tu iras plus tard au paradis».
Le Maakoul (droiture et rectitude morale), comme le Tiqar (savoir se mêler de ses affaires et uniquement de ses affaires), la Touba (rédemption), le Tissir (chance et bénédiction divine) et le Ridat Al Walidine (bénédiction parentale) sont des expressions douces à mon oreille. Elles respirent la nostalgie et exhalent ce parfum incomparable de l’enfance. Je ferme les yeux et je voyage dans le temps. Comme dans un conte de fées, une histoire magique. Il était une fois…
Dans un monde de bisounours, le Maakoul serait une sorte de Graal. C’est une quête à la portée de tous les enfants. Soyons Maakoul, obéissons à nos ainés, embrassons la main de Ba Sidi et Mi Lalla (grand-père et grand-mère), lavons-nous les mains et rinçons-nous les dents avant et après manger, ne faisons pas pipi au lit, ne cherchons pas plus loin, et à la fin nous aurons beaucoup d’enfants et nous vivrons longtemps et heureux.
Mais ce monde n’existe pas. Ce monde ressemble à une histoire merveilleuse que l’on doit lire une fois, quand on est enfant. Après, on referme cette histoire et on la range parmi nos souvenirs enchantés. Au besoin, on la récite comme une berceuse pour avoir raison de nos enfants, quand ils refusent de dormir.
Quand on me dit que le Maakoul est le thème de la bataille électorale qui aura lieu le 7 octobre, l’enfant en moi saute de joie parce qu’il croit qu’il va voter pour le Père Noël, ce vieux barbu qui veut du bien à tous les enfants du monde. Mais l’adulte que je suis grimace.
Je peux comprendre que dans un pays gangrené par la corruption et les mauvaises manières, le Maakoul soit érigé en symbole. Tout le monde en parle, tout le monde le cherche et personne ne le trouve. Je me rappelle de mon ancien professeur de philo qui disait: «Ne cherchez pas le Maakoul chez les autres, cherchez-le en vous, et si vous ne le trouvez pas, créez-le. Et si vous n’y arrivez toujours pas, oubliez-le et grandissez, devenez adultes».
Si, un jour, l’âge de vote au Maroc est ramené à six ans, on pourra reparler de ces merveilleuses histoires de Maakoul. Votez pour ceux qui ne mentent pas, ne volent pas, n’ont aucun vice et sont droits comme des «i», votez pour le Père Noël et les anges à figure humaine!
En attendant, et si vous avez plus de 18 ans, votez plutôt pour ceux qui vous ressemblent (si vous en trouvez, bien sûr) et vous parlent en adultes, le Maroc ne s’en portera pas plus mal.
