Cette campagne de vaccination arrive comme une bénédiction. Elle est carrément porteuse d’espoir. Que le vaccin soit chinois ou américain, cela importe peu, et finalement on s’en fout. Parce ce n’est pas seulement le Covid-19 que l’on combat mais d’autres maladies, d’autres tares.
Faites le test autour de vous, demandez à ceux qui l’ont «fait», vous allez voir: il y a un avant et un après. Ça marche comme une pub pour after shave. Avant, c’est sale et broussailleux. Après, non seulement c’est un visage propre mais c’est aussi un homme nouveau, frais, souriant et heureux, tout cela à la fois. C’est du dépassement/déplacement d’objectif.
Avant, le discours du futur vacciné était à peu près: «On va me mettre à poil sans aucune considération, et devant tout le monde, on va me laisser attendre debout dans le froid ou sous la pluie, on va utiliser des seringues périmées ou déjà utilisées, on va me traiter comme du bétail, c’est la Santé publique!». Après, nous avons droit à tout à fait autre chose. Ceux qui y sont passés en redemandent. Quelqu’un m’a dit : «J’ai hâte d’y retourner!».
Remarquez que ceux qui sont contents, et ils doivent être très nombreux parmi les 3,3 millions de Marocains qui ont déjà été vaccinés, ne parlent même plus de Covid-19, ni de santé. Ou alors à peine. Ils sont contents surtout parce qu’ils ont été bien reçus. Ils ont été respectés. Ils ont été traités comme des êtres humains, des citoyens. Ils ont trouvé quelqu’un, à chaque étape, qui était là pour les écouter, leur prendre la main, leur expliquer, les accompagner jusqu’à la porte. Et avec un sourire bienveillant, s’il vous plait.
Le vaccin lui-même compte peu au bout du compte. Ce n’est qu’une piqure, c'est-à-dire un acte mineur, cela dure quelques secondes. Mais, avant et après, il y a tout un rituel, toute une mécanique, étalés sur plusieurs jours, avec des échanges de sms, parfois des appels et des contre-appels. Tout cela est important, inédit ou presque.
Cette «socialisation» fait un bien fou, par ces temps de couvre-feu et de semi-confinement où l’on voit et fréquente forcément moins de monde.
Et puis, rappelez-vous, nous vivons quand même dans un pays où l’administration ne répond pas toujours quand on l’appelle au téléphone. Quand quelqu’un daigne décrocher le combiné, il ne dit pas bonjour et vous parle mal. Et quand vous vous présentez sur place, vous êtes perdus, vous vous sentez broyés, cela se passe si mal que vous n’avez plus qu’une envie: vous échapper!
La campagne de vaccination nous donne à voir et à ressentir le contraire. C’est, m’a dit un proche qui n’en croyait pas ses yeux devant tant d’amabilité et d’attention, «comme si on n’était pas au Maroc!».
Cette campagne de vaccination pourrait se transformer, tout doucement, en campagne de réconciliation. Une petite réconciliation. Avec qui, quoi? Je suis certain que chacun connait la réponse.
Allez, pourvu que cela dure et surtout se prolonge au-delà des limites de la campagne!