Avant la période coloniale, le Maroc était le cœur politique, religieux, économique et commercial de tout l’ouest saharien. Il était également le point d’écoulement des marchandises en provenance du monde sahélien, le Bilad-al-Sudan, qui étaient échangées contre ses productions artisanales et agricoles. Sijilmassa qui était en relation directe avec tout le monde ouest-africain était la métropole économique du Sahara occidental.
Le roi Hassan II déclara à ce sujet: «le Maroc ressemble à un arbre dont les racines nourricières plongent profondément dans la terre d'Afrique, et qui respire grâce à son feuillage bruissant aux vents de l'Europe (...) en récupérant leur Sahara, les Marocains ne font que renouer avec les hauts lieux qui furent, par le passé, le creuset de leurs dynasties, le point de départ de leur rayonnement au-delà de leurs frontières et les racines nourricières de l'arbre qui constitue leur communauté».
Le Maroc étendait son rayonnement au-delà de Tagant et contrôlait les pistes du Sahara occidental ainsi que ses principaux centres urbains et caravaniers. Economiquement, l’ensemble commercial marocain partait des villes du nord du Maroc pour atteindre la vallée du fleuve Sénégal et la région de Tombouctou par les marchés de Guelmim et de Tindouf. Dans cet ensemble, les marchandises circulaient sans entraves douanières. Il s’agissait en effet d’échanges internes pratiqués dans les limites d’un seul et même Etat, l’Etat marocain. Au sud-est, le Touat et le Gourara, que la France attribua à l’Algérie en 1962, étaient dirigés par des caïds nommés par le sultan du Maroc.
Avant la colonisation, les populations, qui vivaient dans cet immense ensemble, étaient culturellement, politiquement, économiquement, familialement et religieusement liées à l’Etat marocain, souverain depuis 788 de l’ère chrétienne.
Depuis la plus haute Antiquité, les populations nomades de l’ouest saharien étaient tournés vers l’actuel Maroc, leurs immenses zones de transhumance s’étendant jusqu’à la basse Moulouya.
Les fondateurs de l’empire almoravide, né dans les régions voisines de l’Adrar, avaient été convertis à l’Islam par des prédicateurs venus du Maroc dès la fin du IXe siècle. En dix ans, de 1042 à 1052, les Almoravides unifièrent tout le Sahara occidental, puis ils constituèrent un immense empire s’étendant depuis le fleuve Sénégal jusqu’au cœur de l’Espagne.
En 1591, sous le règne du sultan Al-Mansour, une armée marocaine traversa le Sahara occidental pour réduire l’empire songhai, rival méridional du Maroc. Jusqu’en 1660, à Tombouctou, la prière fut dite au nom du sultan du Maroc.
A la suite des partages coloniaux, furent tracées des frontières qui ne tinrent pas compte de ces réalités socio-historiques. Les terrains de parcours des tribus nomades furent alors divisés entre les territoires administratifs coloniaux. Ces limites artificielles ayant donné naissance aux frontières des Etats, nés des indépendances, les populations furent alors séparées du Maroc et rattachées à ces héritiers des entités administratives coloniales.
En réalité, le Maroc fut alors démembré et ses droits historiques violés. Tant à l’est, vers l’actuelle Algérie, qu’au sud, d’où étaient pourtant parties les ultimes résistances à la colonisation avec Mâ el Aïnin et El-Hiba.
Le Maroc fut alors placé face à une situation insolite. Il lui était en effet demandé, non seulement d’entériner la perte de ses provinces de l’est et du sud, mais encore d’accepter qu’elles fussent offertes à des Etats qui n’avaient jamais existé par le passé.
Dans un souci de règlement politique régional, le Maroc renonça à ses légitimes revendications territoriales vis-à-vis de l’Algérie, à savoir Tindouf, le Touat et le Gourara, mais, en échange, il attendait que cette dernière l’épaule dans ses revendications au sujet du «Sahara espagnol».
Les espérances marocaines furent déçues car l’Algérie devint le principal soutien du Polisario.