C’est le moment de souhaiter aux Chrétiens résidant au Maroc un bon carême – eh oui, le carême chrétien a commencé mercredi 1e mars et il dure quarante jours – comme eux devraient souhaiter un bon Ramadan à leurs hôtes musulmans dans quelques mois. Ce serait une bonne habitude à prendre pour promouvoir l’esprit de tolérance et de coexistence pacifique qui devrait continuer de régner dans notre beau pays.
J’ai demandé autour de moi. Peu de gens savent que le carême, le Ramadan chrétien en somme, a commencé. Mais ce n’est pas grave, c’est même conforme à l’esprit de ce temps de pénitence et d’introspection. On lit en effet dans l’Evangile selon saint Matthieu (6.1-6.18): «Et quand tu jeûnes, ne prends pas un air abattu, comme les hypocrites: ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. Mais toi, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi ton jeûne ne sera pas connu des hommes mais seulement de Dieu ton Père qui est présent au plus secret de toi.»
A ceux qui s’étonneraient que nous citions l’Evangile, nous ne pouvons que les renvoyer à ce fait aussi surprenant que méconnu: la Bible est un texte sacré pour les Musulmans. En toute logique, ils devraient la lire et s’en inspirer au même titre que le Coran. D’ailleurs, dans ce même texte de Matthieu, on trouve, un peu plus haut : «Quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites qui aiment à se tenir debout dans les synagogues et aux carrefours pour bien montrer aux hommes qu’ils sont en train de prier», une injonction qu’on retrouve presque littéralement dans le Coran.
C’est pourquoi je lance dans ces colonnes un appel à notre Conseil des oulémas: pourquoi ne vous inspireriez-vous pas, messieurs, de ce texte de Matthieu pour sortir une fatwa interdisant la mauvaise haleine pendant le Ramadan ? Pourquoi ne reprendriez-vous pas sa formule (“Parfume-toi la tête et lave-toi le visage“) en la modernisant un peu (“… et brosse-toi les dents avec un bon dentifrice…“) ?
Je me souviens d’un topographe, à Khouribga, qui puait terriblement du bec pendant le Ramadan – c’était insupportable – et qui me rétorqua, quand je lui en fis la remarque, que cette odeur nauséabonde plaisait à Dieu (qu’est-ce qu’il en savait, ce partisan du miasme et du remugle?). Entre ce niais topographe et Saint Matthieu, messieurs les oulémas, dites-nous, une fois pour toutes, qui a raison !