On apprend ce matin qu’une jeune Malienne vient d’accoucher de neuf bébés, cinq filles et quatre garçons, qui se portent bien au moment où je rédige cette chronique. Halima Cissé avait été transférée au Maroc pour bénéficier de meilleurs soins quand son médecin malien s'était aperçu qu’elle était enceinte de plusieurs enfants.
Cette petite information illustre bien la quasi-impossibilité de parler sereinement de la question de la démographie.
En effet, on ne peut humainement que féliciter la maman –cette maman-là– et souhaiter longue vie à ses bébés –ceux-là. Ils ont tout autant le droit de vivre que n’importe qui, à commencer par votre serviteur. Aucune vie n’a a priori plus de mérite qu’une autre. Bienvenue à Halima et à son club des sept, plus deux.
Mais si on fait abstraction des cas particuliers et qu’on ne regarde que les statistiques, le point de vue change. Toute nouvelle naissance représente une bouche de plus à nourrir, un corps à vêtir, à soigner, à distraire pendant des décennies. La Terre n’étant pas extensible à l’infini, tout accroissement de la population signifie que la fin des ressources naturelles est de plus en plus proche. Nous mangeons notre planète, littéralement.
Dans le cas de l’Afrique subsaharienne, c’est encore plus dramatique. Le Mali, dont vient Halima Cissé, ne cesse de voir sa population s’accroître alors qu’il est en grande partie désertique. La seule solution, c’est l’émigration. Mais jusqu’à quand? L’Europe acceptera-t-elle d’absorber le milliard d’Africains qui va s’ajouter à la population actuelle d’ici 2050?
Hélas, dès qu’on ose poser cette question, on se fait traiter de malthusien, de xénophobe, de raciste… Et c’est ainsi qu’une discussion cruciale, vitale, s’arrête immédiatement.
Dans le cas du Maroc, tous les experts sérieux s’accordent pour dire qu’il ne faudrait pas dépasser le chiffre de 40 millions d’habitants. En effet, l’eau manque, les sols s’épuisent et il faudra de toute façon déménager dix millions de Marocains qui habitent sur le littoral à cause de la montée des eaux de l’océan Atlantique.
Heureusement, les Marocaines ne font plus en moyenne que 2,2 enfants et on peut donc stabiliser la population autour de 40 millions d’habitants pour les décennies à venir.
Mais cela suppose que les pays voisins fassent le même effort, ce qui est loin d’être évident. Aucun de leurs dirigeants n’ose prononcer en public le mot ‘D’– Démographie. Que feront alors leurs bébés d’aujourd'hui devenus adultes? Un fonctionnaire d’une ONG sise à Rabat m’a dit il y a quelques mois qu’il travaillait sur un scénario selon lequel le Maroc accueillerait, bon gré mal gré, 17 millions d’immigrants d’ici 2050.
L’arithmétique est hélas irréfutable. 40 + 17 = 57. 57 millions d’habitants en 2050, avec un stress hydrique qui aura empiré, avec des sols qui disparaissent, avec la montée des eaux de l’Atlantique, c’est un scénario cauchemar.
Alors, que fait-on?