Lorsque je m’installai à Amsterdam en 1990 et avant même d'apprendre mon premier mot de néerlandais, je m’enquis du nom du Parti socialiste local. Il s'appelait PVDA. J'y pris ma carte. Depuis, je n'ai cessé de voter pour ce parti, de même que je votais PS en France et USFP au Maroc.
Et voilà que le PVDA, qui a été un grand parti depuis un demi-siècle, a dégringolé lors des élections qui viennent de se tenir la semaine dernière. On est passé d'une trentaine de sièges à... neuf pour ce parti qui a fait la carrière de mes amis Ahmed Aboutaleb, le dynamique maire de Rotterdam, et Khadija Arib, la présidente de la chambre des députés. De façon concomitante, l'USFP au Maroc et le PS en France connaissent leur période la plus noire depuis des décennies.
Ce n'est quand même pas moi qui porte la poisse aux partis les plus proches de mon cœur?
À tous ceux qui auraient tendance à hausser les épaules et à dire "et alors?", rappelons ceci: historiquement, les partis socialistes ont été créés pour défendre la solidarité entre les hommes et la défense des valeurs humanistes, pour lutter contre toutes les injustices, pour promouvoir les Lumières. Ce n'est pas rien! C'était des partis proches du peuple mais qui voulaient atteindre leurs objectifs sans passer par la dictature du prolétariat chère à Lénine. Face à eux, les partis de droite affirmaient l'égoïsme des héritiers ou des gagnants sans scrupule. N'est-ce pas Mme Thatcher qui disait: «La société, ça n'existe pas»? Seuls existaient pour elle la loi du plus fort ou du plus malin, le droit de jouer des coudes et d'écraser les faibles, la compétition. En d'autres termes, et il faut l'affirmer haut et fort, les partis socialistes ont sauvé l'honneur de l'humanité partout où ils se sont formés au cours du 20e siècle.
Ce qui se passe dans les trois pays cités est donc dramatique. L'effondrement des partis socialistes n'est rien moins que l'effondrement des valeurs humaines. Ce monde froid et égoïste, ce monde où Trump est roi après Reagan et Thatcher est un monde où on n'a pas envie de vivre, franchement.
Vous excuserez le ton sinistre de cette chronique mais trop, c'est trop. Aux Pays-Bas, le Parti des Animaux (sic) a aujourd'hui presqu'autant de députés que le Parti Socialiste. Vérifiez... J'adore les matous, les chevaux et les girafes mais un tel résultat est stupéfiant. Faut-il abolir la démocratie et la remplacer par la dictature des chats?