[Note de la direction: ce billet est garanti 100% sans ironie.]
On a tout dit sur l’affaire Ban Ki-Moon… Tout ? Que non pas ! On a oublié de rapporter l’essentiel: comment ce benêt est devenu l’un des hommes les plus importants du monde. Le secrétaire général de l’ONU, ce n’est pas rien, ce n’est pas du pipi de chat. [Note de la direction: notre billettiste vient d’utiliser une expression consacrée par l’usage et qui ne contient aucune allusion aux habitudes culinaires supposées du monsieur dont il cause.] C’est l’un des jobs les plus délicats qui soient. Alors comment un ectoplasme zérolingue (il ne maîtrise aucune langue) a-t-il pu décrocher ce poste alors que des hommes et des femmes brillantissimes et polyglottes ont vu leur candidature écartée?
Voulant en avoir le cœur net, j’ai sauté dans le vol 641 de la KLM samedi 16 mars et vogue la galère, ou plutôt le Boeing, vers New York. Dans l’avion, une petite somnolence me prit qui produisit, au réveil, le haïku suivant: «Ban Ki qui? Ban Ki quoi? Ban Ki rien, Ban Ki s’en va…» pour exprimer l’idée que le Maroc sera toujours là quand l’homoncule de Corée aura disparu. Arrivé à la Nueva York, comme disent les Hispaniques, je n’eus de cesse d’aller sur les bords de l’East River pour manifester tout seul devant le bâtiment de l’ONU et brandir mon poème. Ce fut la plus petite manif de l’Histoire (un seul pèlerin, moi), la plus courte (le temps de demander à un passant obligeant de prendre la photo qui accompagne ce billet), la plus onéreuse par tête de pipe (elle m’a coûté trois mille euros tout compris), mais Dieu, que ce fut agréable !
Un journaliste, rencontré devant l’ONU, m’apprit que les Marocains de New York se réunissaient ce jour-même à 18h au Park Lane Hotel. Je m’y suis invité, le café était odorant et les petits fours délicieux. J’eus l’heur de croiser notre excellent ministre des MRE qui fut tout étonné de me voir, lui qui croyait que je ne quittais jamais mon exil amstellodamois. La rencontre dura quatre heures: nos MRE de chez Obama, quelles que fussent leurs divergences, étaient d’accord sur un point: pas touche au Sahara! Tous ceux qui prirent la parole dirent pis que pendre de Ban Ki Truc et des ganaches qui le manipulent.
Maintenant vous me dites: et ton enquête? Tu as appris quelque chose sur la nomination d’un pégreleux couleur de muraille à la tête du «machin»? Eh bien, oui, j’ai la réponse. Voilà comment cela s’est passé. Une grande puissance (libre à vous d’imaginer qu’il s’agit des États-Unis) venait de se farcir, passez-moi l’expression, deux secrétaires généraux brillants, à la forte personnalité, capables de lui tenir tête: Boutros-Ghali et Kofi Annan. La grande puissance n’avait pas apprécié. Quand fut venu le moment de choisir un nouveau SG, elle exigea de ses partenaires qu’on élût le type le plus effacé, le plus falot, le plus nul, le plus quelconque du monde sublunaire. «J’ai!», hurla quelqu’un, et il sortit de son chapeau l’improbable Ban Ki-Ki.
Le plat asiatique (je ne parle pas d’un plat de nouilles, je veux dire: «l’Asiatique plat»), Ki-Ki donc, s’acquitta parfaitement de sa tâche. Jamais un mot plus haut que l’autre, anodin jusqu’à la transparence, ennuyeux comme la pluie, le fonctionnaire fonctionna. Mollement. La grande puissance en fut ravie. Oubliées, les remontrances insistantes de Boutros-Ghali, la fermeté polie de Kofi Annan, on avait en face de soi l’inconsistance faite homme, l’obscurité faite coréenne, le néant.
Et puis, il y a quelques semaines, Ki-Ki s’aperçut qu’il allait bientôt partir à la retraite et qu’il ne resterait de lui aucune trace, ou peut-être une trace infiniment ténue, de celles que laissent les limaces sur la moquette. Un sursaut de fierté agita sa vide carcasse. Il lui fallait exister, frapper un grand coup, marquer l’Histoire! Mais comment? S’opposer à la Maison Blanche, boxer Poutine, insulter la France, molester la queen de Buckingham, tirer la natte du président chinois? Courageux mais pas téméraire, Ki-Ki choisit de chercher des noises à un pays, le Maroc, dont il pensait qu’on pouvait le fouler aux pieds sans qu’il bronchât. Mauvais calcul. Le reste est connu.
Je suis rentré des States samedi dernier avec le sentiment du devoir accompli. Si le Musée d’art moderne de Rabat en veut, je suis prêt à lui faire don de mon affichette-haïku: elle aura voyagé plus loin que tous mes ancêtres réunis. Et pour la bonne cause…