Une énigme marocaine (suite)

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ChroniqueL’anecdote la plus attendrissante reste celle narrée par M. Diouri.

Le 18/12/2019 à 11h00

Il y a une semaine, je vous ai raconté une histoire ahurissante qui m'était arrivée il y a des lustres, plus précisément dans les années 70; et je vous ai proposé de m’envoyer vos anecdotes les plus surréalistes de cette époque tourmentée. Ainsi nous écririons ensemble l’Histoire de notre pays puisque les officiels ne parlent pas (imaginez à quel point les Mémoires d’un Karim Lamrani auraient été passionnants et instructifs!).

Les lecteurs du 360.ma ont du talent. Réunis en conclave, K., M., Z., A. et votre serviteur ont eu du mal à décerner la médaille d’or qui était promise à l’anecdote la plus ébouriffante.

Hamid, Roudani, Chaouki, Jean-Paul, Faty, Pt2Vue, Omar, Brahim, Hamdaouu, El Mansouri, Salah, Para_Dox, Francis… merci pour vos très intéressantes contributions.

Abdellatif: clairement, vous ne croyez pas aux miracles… Votre explication est la plus rationnelle, elle ne s’applique donc pas à notre beau pays.

Merci à Tess pour le joli jeu de mots. Je vous le chiperai.

Marie: solution ingénieuse mais fausse: il y a toujours eu des Marocains au lycée Lyautey, même s’il s’agissait le plus souvent d’enfants de la haute bourgeoisie et non du fils d’un postier. Vous aurez une médaille en chocolat.

Mais l’anecdote la plus attendrissante reste celle narrée par M. Diouri:

«Nous habitons, mon fils et moi-même, à Casablanca, dans deux quartiers assez distants, mais qui se trouvent desservis par le même facteur. Ce qui fait que mon fils reçoit des lettres qui lui sont adressées et des lettres qui me sont adressées et inversement. Nous sommes ainsi amenés, chaque fois, à remettre à chacun ses lettres et recevoir les siennes. Or, un jour que je rentrais chez moi, j'ai rencontré le facteur qui alimentait ma boîte aux lettres et lui ai demandé pourquoi il distribuait indifféremment nos lettres à mon fils et/ou à moi. Sa surprise à ma question n'égalait que la mienne à sa réponse:

– Mais, mon frère, quand je commence la distribution en passant d'abord par chez ton fils, je remets tout le courrier Diouri à votre fils et quand je commence la distribution par vous, je vous remets tout le courrier.»

En d’autres termes, ce brave facteur avait inventé un algorithme d’optimisation pas très différent de celui qui fit la fortune de Fed Ex…

Mais surtout, il y a quelque chose de profondément humain dans cette histoire. Le facteur fait très naturellement l'hypothèse que père et fils s’entendent bien; peut-être même estime-t-il qu’en les forçant à s’apporter l’un l’autre leurs courriers respectifs, il favorise la paix des familles. En somme, il se prend pour la Providence, comme beaucoup de Marocains. Et pourquoi pas? Il faut bien avoir un modèle.

Pour toutes ces raisons, la médaille d'or du 360.ma va à Mr Diouri. Elle lui sera envoyée par la poste– ce qui veut dire qu’elle atterrira probablement chez son fils.

Par Fouad Laroui
Le 18/12/2019 à 11h00