L’Assemblée nationale française vient de voter à l’unanimité la suppression du mot «race» tel qu’il figure dans l’article 1 de la Constitution. Désormais, cet article est rédigé ainsi : La France «assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de sexe, d’origine ou de religion». Avant, il était notifié ainsi: «sans distinction d’origine, de race ou de religion». Le mot avait été ajouté à cet article en 1946 dans le but justement de lutter contre le racisme. Ce fut une erreur, une mauvaise évaluation de ce dont l’homme est capable.
Cette rectification est révolutionnaire. Les députés de l’extrême droite n’ont pas participé au vote. Normal. Ils croient fermement à l’existence de plusieurs races en considérant que celle dite «blanche» serait supérieure à celle présumée noire ou jaune.
C’est l’argument basique du racisme. Evidemment, ce n’est pas en supprimant le mot qu’on fait disparaître le racisme. Mais on coupe l’herbe sous les pieds de ceux qui ont transformé les différences inhérentes à l’humanité en inégalités. Ainsi la nature a fait des hommes différents mais semblables. L’homme a fait de cet aspect la source des inégalités qu’il justifie par les apparences comme la couleur de la peau, la taille ou la corpulence du corps.
La lutte contre le racisme commence par l’assainissement du langage. Les premières manifestations racistes sont d’ordre langagier. On désigne par des mots blessants ceux qu’on méprise parce qu’ils sont différents. Il est aussi intéressant que l’article 1 comporte «sans distinction de sexe». Ainsi, l’humiliation est dans l’insulte: «nègre» pour «noir», «melon, bougnoule ou bicot» pour «Arabe», «youpin» pour «juif», «rital» pour «italien», etc.
Il y a le mot et la façon de le dire. Le principal c’est de discriminer l’autre, parce qu’il est étranger, venant d’une autre culture, ayant d’autres coutumes et se comportant de manière nouvelle jugée étrange, donc à rejeter, à mépriser, à exclure de la sphère à laquelle appartient celui qui se considère comme supérieur alors qu’il n’y a aucun fondement à ce sentiment et à cette façon d’agir et de vivre.
Les deux groupes humains ayant le plus souffert du racisme dans l’histoire sont les peuples noirs victimes durant des siècles d’esclavage horrible, (le système de l’apartheid aux Etats-Unis et en Afrique du Sud, n’a été aboli que très tardivement) et les juifs qui ont été exterminés par le nazisme durant la Seconde Guerre mondiale.
Le racisme meurtrier a de tout temps marqué les différentes étapes de l’histoire. On a fait la guerre au nom de la supériorité de la religion chrétienne (les croisades), au nom de la supériorité de la «race aryenne» (Hitler), au nom de la purification ethnique (l’ex-Yougoslavie, entre autres).
Aujourd’hui le racisme ne se cache plus. Il s’est décomplexé et s’est banalisé. Des personnes politiques n’hésitent plus à affirmer leur préférence à l’appartenance à la «race blanche», sous-entendu que «la race noire» est forcément inférieure, méprisable, etc. L’ancienne garde des Sceaux, Mme Taubira, a été traitée de «guenon» et d’autres amabilités par des opposants à sa politique. Des supporters italiens d’équipe de football ont jeté des bananes à des joueurs noirs à leur entrée dans le stade. Cela s’est passé l’an dernier. Les insultes ne suffisant pas, on passe à des actes métaphoriques.
Ailleurs on profane des tombes juives ou musulmanes. Une façon d’exprimer son racisme basique en s’attaquant lâchement à des morts.
Ainsi le racisme colle à la peau de l’homme. De tout temps, la dérive raciste a marqué les crises sociales. La lutte contre elle a commencé par le renforcement de l’arsenal juridique. Des lois ont été votées pour punir l’incitation à la haine raciale. Cela n’a jamais intimidé ou découragé les tenants des idéologies racistes.
Comme tout le monde l’a remarqué, l’équipe française qui a remporté le Mondial est composée de joueurs à la peau blanche, à la peau noire, à la peau métissée avec cependant le même sang qui coule dans toutes les veines. Durant le match, l’énergie, la volonté, le talent et la grâce de ces joueurs se moquaient éperdument de la couleur de la peau qui les porte. Parfois le sport, en plus du fait de donner de la joie à un peuple, démontre en toute simplicité combien les préjugés racistes sont stupides et ne correspondent à rien de vrai.