Les incursions de la «psychanalyse» dans le champ des «relations internationales» ne sont pas partagées par un grand nombre d’observateurs et analystes. Selon eux, il n’est pas fondé de transférer des notions comme psychose, névrose, obsession, frustration, pulsion, projection… vers d’autres entités comme les régimes ou les Etats alors que la «psychanalyse» a pour objet l’inconscient de l'«individu»… un «patient-parlant» étendu sur un divan et écouté par un psychanalyste.
Or, il faut bien admettre que le vocabulaire courant, depuis l’invention de la psychanalyse en 1896, a intégré des «concepts» issus de la pensée freudienne, et il n’a pas fallu en être «spécialiste» pour les employer. La pensée freudienne, même si elle est souvent basée sur des «hypothèses», reste formidablement séduisante et a investi tous les champs des sciences humaines. Il y a donc toujours ce choix ou cette possibilité d’user de la «grille de lecture psychanalytique» pour essayer de comprendre le fonctionnement d’entités… derrière lesquelles il y a évidemment toujours des «sujets humains».
Les concepts de la psychanalyse ne sont donc pas caractérisés par l’herméticité et peuvent interagir avec d’autres entités ou d’autres domaines: relations internationales, politique, sociologie, littérature, création artistique, neurosciences…
Cette grille de lecture est souvent employée quand on peine à «comprendre» les soubassements psychologiques de phénomènes collectifs, les motivations de comportement ou d’action.
Aujourd’hui, il y a deux «sujets» dans l’actualité internationale face auxquels analystes et journalistes n’hésitent pas à mobiliser l’appareillage conceptuel freudien pour les interpréter. Le cas de l’invasion de l’Ukraine par le président de la fédération de Russie, Vladimir Poutine. Et le cas de l’animosité inouïe, de l’hostilité ahurissante du régime algérien contre son voisin marocain. Cette détestation résiste à toute analyse objective et de bon sens.
Précisons d’abord que les pays inscrits dans la «normalité» agissent en fonction de leurs intérêts réels, clairement identifiés. Ils sont principalement d’ordre économique, financier ou commercial… Même si une part d’égoïsme ne peut en être évacuée. Ces pays tiennent aussi compte des rapports de force dans leur environnement et ce, à tous les niveaux.
Cette démarche lucide ne s’applique pas aux régimes adoptant des analyses erronées, et refusant de voir les limites de leurs capacités. Ignorant leurs intérêts réels, ils parient sur l’aventurisme en infligeant, parallèlement, des souffrances à leurs populations. Cela ne s’applique pas non plus aux régimes illégitimes, producteurs intarissables de slogans. Des dictatures qui négligent complètement les besoins réels des populations et ne cherchent que leur pérennité au pouvoir par la force, le mensonge et la désinformation. Leur disparition est inéluctable.
Face à des postures faites de faux calculs, d’arrogance et de paranoïa, les analystes sont amenés à chercher du côté de la psychanalyse pour essayer de comprendre les ressorts des hommes qui sont derrière ces régimes.
Suite à l’invasion, devenue problématique, de l’Ukraine, Vladimir Poutine a fait l’objet de centaines d’analyses «psychanalytiques» publiées dans les médias occidentaux. On ne prend pas ici position pour ou contre la «décision» de Poutine. Ce qui nous importe, c’est cette forte incursion de la psychanalyse pour comprendre des faits relevant des relations internationales et de géostratégie.
On citera des titres éloquents dans les médias internationaux: «Je croyais Poutine rationnel, il est en fait paranoïaque», «Vladimir poutine est-il atteint du syndrome d’hubris», «Poutine est-il fou?», «Le tsar et la Russie sur le divan», «Poutine chez Freud», «Comment Poutine s’est enferré dans une vision victimaire», «Guerre en Ukraine: que dit la psychanalyse sur le conflit».
Bien sûr, ni Poutine, ni son régime n’ont été allongés sur un divan mais tout un ensemble de matériaux relatifs au chef de l’Etat russe (sa biographie, son vécu, son langage, ses analyses, ses images, ses interprétations…) ont offert un champ d’étude assez prolifique.
Quant au régime algérien, son hostilité insensée contre notre pays s’est aggravée avec la junte de vieillards cinglés qui sont aujourd’hui aux commandes du pays. Toutes les offres de paix, de communication, de négociation, de dialogue, d’échanges, de partage mutuel des intérêts, de construction de projets communs, de médiations… ont été rejetées par un régime fanatisé et centré sur la haine de tout ce qui est marocain. Face à l’inintelligible, plusieurs analystes marocains ont signé des textes dans lesquels la grille psychanalytique a été mobilisée. Les titres sont éloquents.
«Psychanalyse d’un conflit ou la déraison d’un Chengriha pousse-au-crime», «Que peut encore la diplomatie face à la névrose obsessionnelle du régime algérien», «En Algérie, Antony Blinken a éprouvé la psychose antimarocaine du président Tebboune», «Derrière le contentieux algéro-marocain, la frustration historique de l’Algérie face au Maroc», «Crise Algérie-Maroc: la frustration algérienne», «Maroc-Algérie. Développement, frustration et aigreur», «Crise algéro-marocaine: jalousie, humiliation et frustration derrière les folies du régime algérien», «Dans la tête d’un général algérien»…
«Le pouvoir algérien en proie à la fièvre obsidionale»… a même titré un journaliste algérien. Un auteur français, parmi tant d’autres, a évidemment titré son analyse «La névrose franco-algérienne»… Les Français connaissent tout un chapitre sur la pathologie du pouvoir algérien.
Psychose, névrose, obsession, frustration…, ces mots ne cessent de revenir. Le régime algérien constitue aujourd’hui un corpus exceptionnel, et rare sur la planète Terre, qui fait l’objet d’un grand nombre d’écrits relevant de la psychanalyse. Les protagonistes de ce régime sont devenus un sujet idéal pour ce genre d’étude car ils parlent trop, ne cessent de s’agiter, de plastronner dans le déni de leur fragilité, de s’indigner faussement, de s’immiscer dans ce qui ne les regarde pas, de gérer un nombre infini de conflits en interne et en externe - qu’ils provoquent d’ailleurs.
Le peuple algérien et ses intérêts réels sont le dernier souci du pouvoir névrosé qui l’opprime et qui est lui-même traversé par de féroces luttes de clans. Le seul objectif du régime est de rester en place en entretenant sciemment un conflit artificiel avec le Maroc, l’ennemi utile, et de tout faire pour l’affaiblir et le faire plier, avec l’appui de sa lubie polisarienne qui ne survivrait pas 30 jours sans le biberon de la junte. La résistance et la résilience du peuple marocain, soudé autour de ses institutions, ont aggravé la détresse psychique des gérontes au pouvoir en Algérie.
Mais puisque on est dans le champ «psy», il faut bien dire aussi un mot sur ce réflexe de «mimétisme» du pouvoir algérien qui encourage l’imitation ou le plagiat de réalisations propres à la collectivité marocaine, allant parfois jusqu'à l’appropriation insensée des faits d’histoire et des faits socioculturel propres à la nation marocaine.
C’est le symptôme d’une absence d’identité, car tant que la junte ne prendra pas une distance avec le modèle marocain (le haïr ou l’aimer c’est pareil!), elle sera dans l’incapacité de fédérer le peuple autour d’une identité commune. Elle doit quitter cette zone de confusion avec soi et autrui. La tentative d’absorption de la substance d’un modèle (même niée et non reconnue) aboutit rarement à la sérénité.
Enfin, par opposition à cette pathologie et cet état de tension généré et entretenu par la junte, le Maroc a une idée claire de ses intérêts. C’est-à-dire son intégrité territoriale, son développement économique, la prospérité de son peuple, des relations apaisées avec ses voisins et la communauté internationale.
Notre pays, sûr de son identité, de sa place dans le monde, tolérant, discret et travailleur est investi pleinement dans son développement et ce, à l’instar de la majorité des pays sages de la communauté internationale. De ce fait, nul besoin de recourir à Freud, Jung ou Mendel pour comprendre les leviers d’action de pays apaisés dont les objectifs sont intelligibles, transparents et lisibles.