Shana Tova, Assegass Amegaz, Sana Saïda et Bonne année… Frère Gims!

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ChroniqueSi on devait suivre votre logique, on aurait plus qu’à faire nos valises pour l’Afghanistan, là où on pense de la sorte et où, soit dit en passant, la musique est considérée comme haram et où on ne se sape pas en Loulou et Boutin, ni en Coco na Chanel.

Le 09/01/2022 à 12h01

Quelle mouche a bien pu piquer Gims en ce début d’année 2022? Le chanteur congolais établi à Marrakech et converti à l’islam, depuis 2004, s’est en effet fendu d’une vidéo adressée à ses fans, leur enjoignant de ne plus lui souhaiter la bonne année, ni d’ailleurs de lui adresser des vœux d’anniversaire non plus. Et pour cause, selon l’interprète de Bella ou encore Sapés comme jamais, cela ne serait pas conforme à nos traditions religieuses à nous autres, les «muslims».

Gims se dit aussi choqué par ces«frères» qui achètent des sapins de Noël et fêtent Thanksgiving plutôt que de fêter exclusivement les Aïds musulmans, et de se «concentrer sur nos trucs à nous». Soit, on vous le concède, ce discours là n’est pas nouveau et bon nombre de Marocains pensent la même chose mais quand même, on aurait espéré que Gims retienne du Maroc, son pays d’adoption, un certain esprit de tolérance et de métissage qui font l’histoire et la grandeur de ce pays.

Car ce que semble oublier ce cher Gims, c’est qu’au Maroc, où on vit en harmonie entre Marocains de confessions différentes et où les composantes arabes, amazighs, hassanies et juives du pays sont inscrites dans la constitution, on respecte et on célèbre les traditions de tous les Marocains, même quand elles ne sont pas musulmanes.

On souhaite ainsi Assegaz Amegaz le 13 janvier aux Marocains de culture amazighe alors même que la nouvelle année amazighe, Yannayer, est tirée du calendrier agraire et est antérieure à l’ère musulmane de plus de 950 ans, parce que oui ça fait partie de notre culture.

On souhaite Shana Tova à nos concitoyens de confession juive à l’occasion de Roch Hachana parce que oui, ça fait aussi partie de notre culture et on leur souhaite aussi Shabat Shalom tous les vendredis que Dieu fait et on fête même ensemble la Mimouna, fête judéo-marocaine par excellence.

Sana Saïda aux musulmans, bonne année et joyeux Noël aux chrétiens et à tout le monde en général. Et oui, si au passage on peut aussi ripailler autour d’une bonne bûche à Noël, d’une galette à l’épiphanie, d’une Moufleta à la Mimouna, d’un bon couscous à Yennayer et bien pourquoi pas? Le Maroc, où vous vivez semble-t-il très bien (allah yzidek) est le seul pays au monde où l’on fête quatre fois le nouvel an chaque année, et ça nous en sommes très fiers!

Quant à s’offusquer de la célébration d’un anniversaire, parce que ce ne serait pas notre culture, et «que ça nous rapproche de la mort»… WAAAW, où êtes-vous allé pécho des trucs pareils?

Toutes ces célébrations font partie de ce qu’on appelle le vivre-ensemble et n’est-ce pas là le fondement même des religions monothéistes, l’islam y compris? Alors dans un monde où l’on bouffe des discours haineux à longueur de journée, ne peut-on pas cher Gims profiter de ces fêtes de fin d’année chrétiennes qui symbolisent des valeurs positives d’espoir, de paix et d’amour pour transmettre ces mêmes sentiments à tous?

Car si on devait suivre votre logique, on aurait plus qu’à faire nos valises pour l’Afghanistan, là où on pense de la sorte et où, soit dit en passant, la musique est considérée comme haram et où on ne se sape pas en Loulou et Boutin, ni en Coco na Chanel et où on ne voit pas d’un bon œil un homme qui en voyant une Bella danser le soir, voudrait devenir la chaise sur laquelle elle s'assoit et encore moins l’ombre de son iench’.

Alors tant pis si les autres ne nous souhaitent pas forcément une bonne année hijria à nous autres musulmans, ce n’est pas pour autant qu’il convient de s’enfermer dans le communautarisme et de se draper d’une fierté mal placée.

En ce début d’année 2022, on vous souhaite cher Gims de revoir votre copie, d’emplir votre cœur d’amour et de tolérance et de continuer à nous faire de belles chansons sur lesquelles on prend plaisir à chanter comme des casseroles et à se trémousser de façon pas très catholique, on en convient.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 09/01/2022 à 12h01