Quand on est une femme au Maroc, partir à la plage relève de plus en plus du parcours du combattant tant on se conditionne dès le lever du soleil à affronter des regards indécents, à entendre des remarques salaces et à se contrôler pour ne pas mettre sa main dans la figure de ce morveux qui fait exprès de frôler nos fesses dans l’eau.
Face à ce type de comportements indignes de l’intelligence et de l’élégance de beaucoup d’hommes, les femmes se protègent de différentes manières.
Certaines choisissent d’oublier les plages publiques au profit des plages privées où à coup de «boum boum boum», elles se crèment le corps en sirotant leur cocktail sans craindre de voir rappliquer des gardiens de la vertu.
D’autres changent carrément de pays l’été venu et s’en vont se dorer la pilule en monokini sur les plages andalouses, portugaises ou grecques.
Il y a aussi celles qui osent encore braver les regards en «exhibant» leur corps en maillot, pour défier de leur nudité partielle cette radicalisation des esprits et pour ne pas céder le terrain à une mentalité rétrograde qui voudrait faire passer un plaisir aussi simple que celui de bronzer en interdit et par-dessus tout, parce qu’au Maroc, c’est un droit dont on dispose et dont on entend jouir.
Il y a celles qui préfèrent rester chez elles. Adieu la mer, je t’aimais bien… se disent-elles nostalgiques du sel sur la peau, de la caresse de l’eau et du sable chaud.
Et puis il y a celles qui se voilent, gagnant ainsi, pensent-elles, la paix de l’esprit et du corps, et des «hassanates» au passage.
Chacune à l’abri de son parasol, les femmes, retranchées de chaque côté de leur code vestimentaire, se scrutent sans pitié. Elles, ces meilleures ennemies du monde, prêtent à se faire la guerre pour avoir la paix.
On reproche à l’une son burkini, cette aberration vestimentaire pseudo-religieuse qui permettrait de se baigner sans attirer le regard de mâles affamés. L’attitude «je suis mastoura même à la plage» agace au plus haut point ces autres, celles qui estiment que le respect d’un homme ne doit pas se gagner en se voilant la face.
De l’autre côté du voile, on n’en pense pas moins de ce manque de pudeur, de cette chair qui s’expose, indécente. Il ne faudra pas qu’elle vienne se plaindre quand elle se sera faite agressée.
Mais après tout, «c’est entre elle et Dieu», se sermone-t-on ensuite, après s’être laissées aller à ces pensées coupables.
Pendant ce temps-là, ces messieurs, bien loin de nos préoccupations vestimentaires, religieuses et sociétales, se roulent dans les vagues, font quelques brasses et rêvent d’être le nouveau Ronaldo en échangeant des passes.