Je ne sais pas si je suis obligé de préciser, à vous mes chers lecteurs et mes chères lectrices qui êtes si éclairé(e)s et toujours si bien informé(e)s que ce titre, ou du moins une partie, je l’ai emprunté au dernier livre, encore un, de Nicolas Sarkozy: Tout pour la France. Si je trouve que ce titre est plutôt bien inspiré, je ne pourrais pas dire de même de son auteur pour la simple raison que je ne l’ai pas encore lu et, d’ailleurs, je ne pense pas que je vais le lire. Je ne le lirai parce que d’abord Sarko n’est pas ma tasse de thé. Ensuite, je n’aime pas du tout lire les livres écrits par des nègres.
Oh non, je ne parle pas des nègres, les vrais, car ceux-là – et ceux qui me connaissent le savent bien - ce sont mes frères, mes frères de lait, pourrais-je dire. Oui, j’aime les Noirs et je me suis toujours senti très proche d’eux au point qu’on m’a surnommé «le nègre blanc». Je crois que je vous l’ai déjà dit, mais tant pis car j’aime bien répéter les trucs qui me plaisent.
Revenons maintenant aux nègres de Sarkozy qui sont payés pour écrire en son nom et à sa place des inepties tout juste bonnes pour des canards de supermarché. Maintenant, je ne voudrais pas dire aux Français pour qui voter, mais s’ils ont envie, cinq ans après l’avoir exclu, de redoubler la classe avec Sarko, ce sont eux qui voient.
Mais comme a dit récemment la charmante blonde et néanmoins intelligente Vanessa Burgraff (qui a remplacé Léa Salamé dans On n'est pas couché): «Quand on perd, on part». Moi j’aurais dit plutôt: quand on perd, on ne revient pas. Mais, je le répète, ça ne me regarde pas. En fait, si je parle de tout cela, même avec autant de légèreté, de désinvolture et d’insolence, c’est parce que j’avais envie de vous parler d’absolument autre chose, et qui est intimement lié à la France et à notre histoire commune avec ce pays et avec son peuple.
La semaine dernière, un grand ami, un vrai nègre blanc lui aussi, m’a envoyé le lien d’une lettre qu’avait adressée le 1er novembre 1960 Charles André Julien, qui était à l’époque doyen de la Faculté des Lettres de Rabat, à M. Bennani, Directeur du Protocole de Feu Mohammed V.
Cette lettre est historique à plus d’un titre. Elle est assez longue, mais je vais vous citer un seul petit passage qui est, à lui seul, vous allez le voir, absolument édifiant. «J’ai toujours été partisan de l’arabisation, mais de l’arabisation par le haut. Je crains que celle que l’on pratique dans la conjoncture présente ne fasse du Maroc en peu d’années un pays intellectuellement sous-développé. Si les responsables ne s’en rendaient pas compte, on n’assisterait pas à ce fait paradoxal que pas un fonctionnaire, sans parler des hauts dignitaires et même des Oulémas, n’envoie ses enfants dans des écoles marocaines. On prône la culture arabe, mais on se bat aux portes de la Mission pour obtenir des places dans des établissements français. Le résultat apparaîtra d’ici peu d’années, il y aura au Maroc deux classes sociales : celle des privilégiés qui auront bénéficié d’une culture occidentale donnée avec éclat et grâce à laquelle ils occuperont les postes de commande et celle de la masse cantonnée dans les études d’arabe médiocrement organisées dans les conditions actuelles et qui les cantonneront dans les cadres subalternes».
Je vous rappelle que cette lettre a été écrite en 1960, c’est-à-dire il y a 56 ans. Les gens qui sont visés et qui sont presque cités nommément dans cette lettre devraient rougir de honte, et ceux qui ne sont plus de ce monde, devraient se retourner dans leur tombe. Moi-même qui suis, d’une manière tout à fait accidentelle, le fruit de cette fameuse «mission française», je suis furieux de constater que tout ce qu’avait prévu ce génie visionnaire s’avère terriblement vrai aujourd’hui.
En faisant ce rappel, je ne suis même pas sûr que les démocrates et plus généralement les «modernistes» de ce pays vont sauter sur l’occasion pour présenter un projet alternatif pour notre enseignement qui a été et qui est toujours un enseignement de classes.
Non, je pense que personne n’en parlera même pas durant la prochaine campagne électorale. D’abord parce qu’il y a plus terre-à-terre à débattre, et puis, surtout, parce que la plupart de nos ténors politiques, comme le prédisait Charles André Julien, font partie, justement, des «privilégiés qui (ont) bénéficié d’une culture occidentale donnée avec éclat et grâce à laquelle ils (occupent) les postes de commande».
Voilà. J’ai tout dit ou presque. Avant de finir, je voudrais quand même remercier Nicolas Sarkozy qui a servi malgré lui de tremplin à ce coup de gueule impromptu mais tout à fait sincère.
Maintenant, je n’ai plus qu’à vous dire vivement un enseignement plus juste et plus qualitatif pour tous et vivement mardi prochain.