«Big Data Djihad», c’est une histoire d’amour vache, de réseaux sociaux HS, des émotions édulcorées, un Dieu qui ne compte que les larmes des femmes, un monde «qui pue la merde» car peuplé de «trous de balles». Dans un registre cru, Hicham Lasri dépeint donc une humanité enracinée dans la peur, qui fait le sel du monde moderne.
Le360 vous convie à découvrir les bonnes feuilles d’un roman décrivant un anti-héros génial, qui casse Internet pour punir une influenceuse qui l’a quitté, sans que toutes les polices du monde ne parviennent à savoir ni comment, ni pourquoi.
... dans l’ascenseur.
Je croise le postier avec son sourire et ses haillons jaunes. Les écrivaillons de lettres anonymes font aussi partie de la fange de ce marécage dangereux qui borde ma vie de tous côtés. En fait de lettres anonymes, il s’agit de SMS, de messages, de mails...
La modernité n’a pas chassé le moyenâgeux faquin et pustuleux. Ah, les lettres anonymes, monument que nous ont laissé les Français après la fin de la Possession, avec la statue du Maréchal Lyautey en Don Quichotte et les diplômés bougnoules qui ne savent pas lire l’arabe en Sancho Panza.
J’aime ces lettres anonymes qui suintent une forme tordue d’amour. Elles disent quoi, ces lettres? Peu de choses. Entre deux menaces de mort, des révélations croustillantes, des tentatives d’extorsion risibles et l’ineffable vérité sur la Pisseuse de Dos! Un commerce qui manque d’efficacité que ces lettres anonymes, vaguement amicales, vaguement menaçantes! Ils essaient de m’agonir, ils ne savent pas que je suis revenu de la mort et que bientôt je vais marcher sur le tapis du temps comme Jésus Christmas sur l’eau de boudin. M’agonir, moi! Il n’y a pas assez de pages pour déployer mon rire le plus sincère et le plus ironique. C’est toujours étourdissant de se découvrir des ennemis quand on est tellement dans son monde passé au gel antiseptique du désaveu social, quand le monde est dépieuté des figurants, obséquieux et autres quémandeurs.
Des ennemis? Pourquoi faire?
Je suis toujours...
... dans l’ascenseur.
Les scrupules font trébucher mes idées, scrupulus en latin signifie «petit caillou» et j’aurais aimé ne pas en avoir dans mes chaussures. Caca! De manière médiumnique, je réalise que l’étage où se trouve mon appartement n’est probablement plus là. J’en ai marre d’être un personnage rageur et maximaliste, je voudrais bien débrancher mon cerveau et le laisser refroidir une heure ou deux. Je ne veux plus être irascible, narquois. Je veux être libre, même un peu. Soulagé du poids mort des autres! De leur souffle souffreteux de soufre... Kennedy a clamé un jour à Berlin: «La liberté est indivisible, et lorsqu’un seul homme est réduit en esclavage, aucun n’est libre.»
C’est ça! Démagogue. La liberté, c’est un souffle à la fois, on ne peut pas remplir ses poumons d’air pour le reste de sa vie ni même pour une journée: un souffle à la fois et avec de l’effort, et surtout il ne faut pas oublier comment on respire.