L’écrivain Togolais Sami Tchak fait partie des auteurs de marque invités à la deuxième édition du Festival littératures africaines qui se déroule à Marrakech jusqu’au dimanche 11 février. Dans cet entretien avec Le360, il préconise plus de rapprochement entre les auteurs africains et dit espérer un retour au Togo après s’être fait connaître en France, où il a déjà édité quatre romans. Mais d’abord, il faudrait, selon lui, développer la production littéraire en Afrique et organiser le secteur du livre et de l’édition.
Le360: Pensez-vous que les auteurs africains se connaissent suffisamment?
Sami Tchak: Je pense que certains se connaissent mieux que d’autres. C’est selon les générations. Moi, je me souviens que, dans les années 2000, lorsque nous sommes arrivés en littérature, on se connaissait avec les Salim Bachi, Anouar Ben Malek, Mahi Binebine… Mais il est vrai que notre génération était peut-être un peu plus ouverte, alors que les jeunes auteurs d’aujourd’hui ne se connaissent pas assez.
De jeunes écrivains marocains ne sont pas connus nécessairement par des jeunes écrivains africains. Idem pour les Algériens. Parfois, on a tendance à parler de l’Afrique noire et du Maghreb. Lorsque je suis en Algérie, je n’ai pas l’impression que les auteurs algériens connaissent tant que ça leurs confrères marocains. Donc, globalement, on se connaît mal.
Lire aussi : Festival du livre africain de Marrakech: c’est parti pour la deuxième édition
Vous êtes connu pour être assez transgressif dans votre écriture. Pensez-vous que, si vous n’aviez pas fait votre carrière en France, cela aurait été le cas?
Ce sont les autres qui me voient comme étant transgressif. Mais je pense en effet, sincèrement, que si j’écrivais au Togo, je me serais mis certaines limites. Le fait d’être un peu excentré en France me donne peut-être une liberté que je ne me serais pas permise dans mon pays. Je crois franchement qu’il y a très peu de marge de liberté dans mon pays. Non pas parce qu’on m’aurait censuré, mais plutôt parce que je me serais autocensuré.
«Si j’écrivais au Togo, je me serais mis certaines limites. Non pas parce qu’on m’aurait censuré, mais plutôt parce que je me serais autocensuré.»
— Sami Tchak, romancier et essayiste togolais.
Pensez-vous qu’une indépendance des auteurs africains d’expression française, qui ont fait leur carrière en dehors de leurs pays d’origine, est possible?
C’est possible. À condition que les auteurs africains ne pensent pas que leur destin dépendrait seulement des prix reçus en Occident. Tant qu’ils ont ce rêve, ce sera difficile. Il faudrait que nous ayons des prix nous permettant de nous faire connaître dans le monde entier.
Envisagez-vous un retour au Togo?
C’est ce que je souhaite. En collaborant avec des éditeurs sur place, j’ai publié en 2023 mon dernier roman exclusivement au Togo. Il faudrait qu’à un moment nous ayons des productions dans nos pays, plutôt que de les publier tous à l’étranger. Ce roman, intitulé «Mélodie pour une douleur», parle d’un homme qui raconte sa souffrance suite à la maladie de son enfant.
Même s’il n’y a pas beaucoup de lecteurs au Togo, le roman a été plutôt bien accueilli, dans la mesure ou au moins en publiant chez moi, il y a une adhésion par rapport à ma démarche.